vendredi 25 février 2022

Du Côté de chez Sam

 

 
"Still Playin' Favorites" 
 
Don McLean nous avait offert en 1973 un album intitulé Playin' Favorites, à dominante rurale et acoustique, dans lequel il rendait hommage à quelques-uns de ses maîtres, de Buddy Holly à Jimmie Rodgers et où les morceaux traditionnels folk, blues et bluegrass étaient à l'honneur. Quarante-sept ans plus tard, il récidive avec Still Playin' Favorites paru en octobre 2020 (sous forme digitale). Cette fois, Don creuse davantage le sillon avec une approche plus rock. Plus de violon ni de banjo mais deux guitares électriques (Vip Vipperman et Michael Severs), un piano (Tony Migliore), une basse (Mark Prentice) et une batterie (Jerry Kroon). Bien sûr, en plus de sa guitare acoustique, Don McLean est venu avec son meilleur instrument, une voix qui n'a rien perdu de ses qualités en un demi-siècle. Les titres repris vont de Bessie Smith (Backwater Blues) à Johnny Horton (Got The Bull By The Horns) en passant par Johnny Cash époque Sun (So Doggone Lonesome), Hoyt Axton (Greenback Dollar), Elvis Presley (Little Sister, Treat Me Nice) et Bob Dylan (Most Likely You Go Your Way And I’ll Go Mine). Rien de neuf, sinon un réel plaisir qui donne une furieuse envie de se replonger dans les originaux. 
 

Julie CHRISTENSEN 

"11 From Kevin: Songs Of Kevin Gordon" 

Cette artiste est active depuis quatre décennies mais je ne la connaissais que parce qu'elle avait collaboré avec Leonard Cohen (je l'ai aussi croisée sur des disques de Bruce Joyner ou Neal Casal), après avoir co-fondé (et quitté) Divine Horsemen. Je découvre seulement sa carrière solo (alos qu'elle vient de fêter ses 66 ans) parce qu'elle a eu la bonne idée de consacrer un album entier à Kevin Gordon, qui mène depuis près de trente ans une carrière aussi impeccable que discrète, jalonnée d'albums de grande qualité tels qu Cadillac Jack's #1 Son, Down To The Well ou Tilt And Shine, le plus récent. Julie reprend donc onze titres qui rendent justice à l'un des trésors cachés du songwriting folk-rock américain. En fait il il y a douze titres car Heart's Not In It, coécrit avec Gwil Owen est enchaîné avec Down To The Well, coécrit avec Colin Linden, et cette suite de près de neuf minutes est à la fois le point central et le moment le plus fort de l'album. Si l'objectif était de mettre en valeur les compositions de Kevin, on peut affirmer sans hésiter qu'il est atteint. Mais il permet aussi d'apprécier les grandes qualités d'interprète de Julie Chistensen, accompagnée par des partenaires dont la carte de visite parle pour eux, tels que Sergio Webb, Gregory Boaz, Irakli Gabriel, Brent Moyer, Chris Binelli ou Chris Tench

 

JOHNSMITH 

"Backroads" 

Johnsmith a co-produit son neuvième album avec Tom Prasada-Rao. Cet homme, aussi discret que talentueux nous offre treize nouvelles compositions, tranquilles et bucoliques, au charme indéniable et pleines d'âme. Dès le premier titre, on a envie de se laisser bercer par les accords de guitare et la voix doucement éraillée de John. L'homme chante la campagne, adresse des mots d'amour à son épouse de toujours (Forty Years), à son pays, à son Wisconsin où il vit au bord du Mississippi. Les claviers (en particulier l'accordéon) de Radoslav Lorkovic répondent au bouzouki, au fiddle et au banjo de Tim O'Brien et à la pedal steel de Darrell Scott. Le parfum country de Virgil's Sweet Six String et Rattle My Bones alterne avec des titres plus méditatifs comme Out Across the Openness et Before I Go. Des chansons comme Trampealeau et On The Road To Los Alamos, très imagées, sont parmi les meilleures, au même rang que le morceau titre. Depuis ses débuts en 1990 avec Dan Sebranek (ici présent) avec qui il formait le duo Runaway (il s'appelait encore John Smith à ce moment), Johnsmith n'a cessé de se bonifier, d'affiner son art subtil et délicat. 

 

Bobby ALLISON & Gerry SPEHAR 

"Delta Man" 

Bobby Allison est né au Texas et a grandi au Nouveau Mexique, Gerry Spehar (dont je vous ai déjà présenté deux disques dans les colonnes du Cri) vient du Colorado. C'est à Denver, en 1981, que les deux hommes se sont rencontrés et ont commencer à travailler ensemble, enregistrant des maquettes. Quelques années plus tard, Gerry arrêta de se produire pour se consacrer à sa famille alors que Bobby poursuivait sa carrière en solo. Les deux hommes, comme deux frères, continuèrent cependant à écrire ensemble, se rendant régulièrement à Nashville pour enregistrer avec des musiciens tel que Pete Wasner, George Marinelli, Michael Rhodes, Lonnie Wilson ou Rick Plant. Kinda Like Love, Bite The Bullett, Baby's Got The Blues, River, Bubba Billy Boom Boom And Me, The Good Life et Train, Train, Train résultent de ces sessions de la fin des années 1990. Certains titres (Eye Of The Needle et Balmorhea) datent de 2005 alors qu'un autre (Here In The Pass) a été enregistré en 2015 avec les musiciens de I See Hawks In L.A. (Paul Lacques, Paul Marshall et Shawn Nourse). Les titres les plus récents sont: Money, Delta Man et 25 Miles To Brady. Quoique disparate en apparence, cet album de quinze titres présente une belle unité et résume parfaitement les quarante ans d'amitié et de complémentarité de Bobby et Gerry, aussi à l'aise sur des ballades folk que rock ou country-rock.

"Live At RPT's Library" 
Quand on entend Randy Brown, on a l'impression de l'avoir toujours connu. Il fait partie des songwriters qui ont ont toujours quelque chose à dire ou à écrire et le font bien. Il a commencé sa carrière au sein du groupe Jealousy Motel à la fin du siècle dernier avant de publier son premier album solo en 2006 (il n'en a sorti que trois, le dernier, Red Crow, datant de 2019). Cet enregistrement live en studio et solo date de 2017 mais Randy l'a jugé suffisamment bon pour le livrer à ses supporters et les inviter à passer un bon moment avec lui comme en témoignent Walked On The Moon, The Trouble With Me ou But Wait, There's More.
 
 

John PRINE and Friends

"Recorded Live at Newport Folk 2017" 

Voici bientôt deux ans que John Prine nous a quittés et, mise à part l'émouvante chanson I Remember Everything qu'il avait enregistrée peu avant sa disparition n'ont été publiés de lui que des documents live, pas toujours officiels, en concert ou pour des émissions de radio. La fondation des Festivals de Newport nous offre aujourd'hui un double vinyle (en édition limitée) d'un enregistrement au Festival Folk de 2017. Ce projet, annoncé en mars 2021 n'a abouti qu'en fin d'année compte tenu des délais de fabrication des 33 tours. L'objet est superbe, le contenu l'est autant. La face A nous propose John accompagné de son groupe (Kenneth Blevins, David Jacques, Pat McLaughlin et Jason Wilber) pour quatre titres: Love, Love Love, Glory Of True Love, Long Monday et Taking A Walk. Quatre titres encore pour la face B: Your Flag Decal Won't Get You Into Heaven Anymore, Bruised Orange (avec Justin Vernon de Bon Iver), Angel From Montgomery et Fish And Whistle. Au programme de la face C, on trouve All The Best (avec Jim James), Mexican Home, In Spite Of Ourselves (avec Margo Price), That's The Way That The World Goes 'Round et Sam Stone (avec Nathaniel Rateliff). La face D est un joli bouquet final: Hello In There (avec Roger Waters de Pink Floyd et Jesse Wolfe et Holly Laessig de Lucius), puis Lake Marie et, enfin, Paradise (avec les artistes du Festival). Cet album est un véritable best of, enregistré peu avant Tree Of Forgiveness, mais bien fidèle à l'ambiance des concerts qui ont suivi la parution de ce dernier disque, jusqu'à celui de Paris, le 13 février 2020. On écoute sans tristesse, tellement on se plonge vite dans l'ambiance. Un seul regret, John PRINE and Friends Recorded Live at Newport Folk 2017 n'est pas facile à se procurer, le quota de pré-commandes ayant été rapidement atteint. 

 

Various Artists

"Broken Hearts & Dirty Windows - Songs of John Prine Vol. 2" 

On ne se consolera pas forcément avec ce disque hommage, ni de la disparition de John Prine, ni de la difficulté à se procurer l'enregistrement de Newport. En revanche, on ne peut qu'être heureux de voir l'influence qu'avait et qu'à toujours John sur des artistes de générations différentes. Au générique (par ordre d'apparition): Brandi Carlile, Nathaniel Ratheliff, Amanda Shires, Tyler Childers., Margo Price, Valerie June, Jason Isbell, Bonnie Raitt, John Paul White, Iris DeMent, Emmylou Harris et Sturgill Simpson. Tous ont partagé à un moment ou un autre la scène avec John Prine, et les plus jeunes se rappellent la manière qu'il avait de les mettre en valeur. Quant aux titres repris, il faut noter que six sur douze proviennent du premier LP de 1971. Je m'attarderai cependant sur les plus récents, deux chansons nostalgiques et émouvantes: Summer's End, par Valerie June et I Remember Everything, par Brandi Carlile. Heartbreaking, comme on dit par là-bas...

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire