Le deuxième LP de Baptiste W. Hamon paraît en ce
vendredi 5 avril. Il a été précédé de quelques semaines par De mille feux,
un EP (disponible sur les plates formes digitales)
de quatre titres dont deux (Le temps
passe et Aimée) ne figurent pas sur
Soleil, Soleil Bleu. Il annonçait un changement de style (du moins pour
ceux qui aiment les étiquettes et ne percevaient Baptiste que comme un cowboy
français) qui confirme que l'artiste refuse de s'enfermer dans un genre.
Le LP ne comporte que neuf titres et c'est le seul
reproche que j'ai envie de lui adresser. Il peut dérouter certains (cf. plus
haut) mais il est une suprbe confirmation d'un vrai talent. Soleil, soleil bleu, la chanson, et surtout
Je brûle, mi-parlé mi-chanté (une
collaboration avec Mark Daumail qui a donné son titre à l'EP), révèlent de
nouvelles facettes de Baptiste. Ces titres sont comme de délicieux coups de
poing à l'estomac. Coming home, une
ballade folk-rock, est la seule chanson en Anglais (Baptiste dit souvent qu'il
rentre à la maison quand il arrive au Texas). Hervé figurait déjà sur le premier EP, Quittter l'enfance,
mais il bénéficie cette fois d'un invité de marque, Monsieur Miossec, pour une
superbe relecture. Bloody Mary, avec
une ambiance un peu mécanique et lancinante, évoquant une nuit épaisse, doit
son titre à une substance dont certaine loi interdit de faire de la publicité. Il
y a un contraste, du moins dans la couleur musicale, avec le mélancolique J'aimerais tant que tu reviennes et son
introduction à la pedal steel guitar qui démontre que l'Amérique n'est jamais bien
loin des bords de l'Yonne. La personne aimée est sans doute revenue puisque le
titre suivant s'appelle Comme on est bien.
Encore une ambiance différente portée par des claviers addictifs. Mon capitaine pourrait s'intituler Will
Oldham, le retour. C'est un duo, mais pas à la mode classique, Will assurant
ici un contre-chant qui donne à la mélodie un aspect aérien. Du grand art. Le
disque se clôt avec un Le visage des
anges qui commence par ces mots parlés, "souvenirs de brumes de
novembre…", avant que les instruments ne fassent leur entrée les uns après
les autres. Pour moi, les paroles de cette chanson mériteraient de figurer dans
une anthologie de la poésie française. Cela dit, tous les textes de l'album
sont de haut niveau. Baptiste Hamon fait partie de cette nouvelle génération d'auteurs-compositeurs
pour qui culture et syntaxe ne sont pas des mots obscènes. Et si Soleil,
soleil bleu n'est sans doute pas un disque que l'on peut classer dans le
genre americana, malgré la présence d'influences certaines, c'est certainement
un pont jeté entre les genres qui les transcende et les met en lumière, un
disque condamné au succès.
Pour mémoire, voici les chroniques des disques
précédents de Baptiste, toutes publiées dans Le Cri du Coyote que personne
n'accusera de surfer sur la vague du succès.
Le
Cri #143
Quitter l'enfance
Je ne connaissais pas Baptiste avant de le voir
récemment, en ouverture d'un concert d'Eric Taylor. A priori, un moment un peu
pénible en attendant la vedette de la soirée. Et puis il est apparu, avec un
physique à la Matthew McConaughey dans
Dallas Buyers Club et, surtout, coiffé d'une casquette estampillée
Chablis qui me l'a rendu immédiatement sympathique. La partie était presque
gagnée pour celui qui est pour moi la belle révélation ce cet automne. Baptiste
Walker Hamon a été nourri au biberon du folk américain, de Dylan à Cohen, en
passant par Townes Van Zandt, avant de véritablement découvrir la chanson
française. Il a commencé par écrire des chansons en anglais mais a fini par
choisir sa langue maternelle et son premier EP (six titres) démontre qu'il a eu
raison. Trois titres ont été produits par Baptiste au Texas avec un groupe de
bluegrass local, les trois autres par Frédéric Lo, à Paris, avec des musiciens
français, mais aussi Steve Wickham (Waterboys) au violon. Les textes font
souvent référence à l'enfance et baignent dans une douce nostalgie
post-adolescence, les mélodies sont belles à pleurer et les mots s'y posent
avec une délicatesse rare, portés par la diction impeccable de l'artiste. Les bords de l'Yonne et Van Zandt sont deux titres qui résument
bien la démarche de Baptiste W. Hamon. Après Jefferson Noizet, il démontre de
bien belle manière que l'americana de langue française a de beaux jours devant
lui.
Le
Cri #144
Ballade d'Alan Seeger - Chansons sur la Grande Guerre
Peu après
son premier EP Quitter l'Enfance, et avant de s'envoler pour les USA
afin d'enregistrer son premier LP, Baptiste Hamon nous revient avec Ballade
d'Alan Seeger, un disque 5 titres en hommage à ceux qui ont souffert il y a
un siècle, à Verdun ou ailleurs. Bobby
déserteur a été inspiré par la lecture de la Main Coupée de Blaise Cendrars. Tranchées et Hinderburg
s'inspirent librement des carnets privés du soldat Louis Hamon (arrière-grand-père
de Baptiste). I Have A Rendezvous With
Death est un poème d'Alan Seeger (oncle de Pete) mort dans la Somme en
1916, superbement mis en musique par Baptiste qui lui a également consacré le
morceau titre. C'est (trop) court, c'est du grand art, de la musique
country-folk à la française avec des textes et des mélodies qui sortent du lot,
servis par des musiciens à l'unisson. Voici une belle confirmation qui génère
une véritable attente.
Le
Cri #147
Nouvel été
Troisième
EP de Baptiste Hamon, Nouvel Été confirme l'immense talent de cet
auteur-compositeur dons les racines vont de Paris au Texas en passant par
Chablis. Quatre titres seulement, dont deux déjà connus (Peut-être que nous serions heureux et Van Zandt) et réenregistrés à Nashville composent ce disque qui
permet d'attendre avec moins d'impatience un premier LP prévu pour début 2016.
Les deux autres titres (Terpsichore
et Maria Chapdelaine) démontrent que
l'on peut aborder en musique des sujets plutôt littéraires sans être ennuyeux.
Un mot sur les musiciens: outre les amis Alexandre Bourit et Alma Forrer, on
note les noms de Billy Contreras, Jared Reynolds ou Pete Finney qui ont
auparavant officié avec (liste non exhaustive) Charlie Louvin, Justin Townes
Earle, Patty Loveless, Phil Lee… Vous ne serez pas étonnés de savoir que je
salive en attendant la suite!
Le
Cri #149
L'insouciance
Tout a commencé comme un bruissement, comme un
souffle entretenu par le Cri du Coyote qui a présenté les trois EP de Baptiste
W. Hamon (numéros 143, 144 et 147). Et puis c'est devenu une rumeur, quelque
chose d'incontrôlable, au point que Télérama, Alcaline et même l'Académie
Charles Cros se sont emparés de la chose pour relayer ce qui devient une
certitude: Baptiste a tout pour devenir un des grands de la chanson française. Il
est de ceux (rares) qui se nourrissent avec bonheur d'une double culture, représentée
par deux symboles: la casquette Chablis pour l'aspect terroir à la française
(la photo qui illustre la premire page du livret est à cet égard révélatrice);
le W (pour Walker) intercalé entre son nom et son prénom, qui résume son amour
pour Townes Van Zandt, le Texas et la musique, folk ou country, américaine. Le
premier LP de Baptiste, L'insouciance (titre dans le prolongement de
celui du premier EP Quitter l'enfance), a été enregistré à Nashville par
Mark Nevers, une référence. Ceux qui suivent depuis le début seront en terrain
familier. Trois titres faisaient déjà partie de l'EP Nouvel été, dont Van Zandt et Peut-être que nous serions heureux - avec la lumineuse Alma Forrer
- qui avaient déjà été publiés avec d'autres arrangements. Il en est de même pour
La ballade d'Alan Seeger ou Comme la vie est belle (cette fois-ci en
duo bilingue avec Will Oldham). Joséphine
était également un titre connu en concert ou sur youtube. Il y a donc une
certaine frustration de ne pas découvrir davantage de titres nouveaux mais
l'ensemble est tellement riche est cohérent que ce sentiment s'efface vite. Le
bonheur de jouer est de chanter est ressenti à chaque instant, Baptiste joue
les chefs d'orchestre à l'ancienne (bluegrass, jazz), invitant les musiciens à
prendre le solo: "take it Billy" (Contreras, au violon), "take
it Ryan" (O'Donnell, à la guitare). Musicalement, l'album balance sans
heurt entre americana et chanson française presque traditionnelle, avec comme
dénominateur commun des textes très travaillés et un maniement de la langue que
n'auraient pas renié Brassens et Ferré. Les référence littéraires ou
mythologiques, de Faulkner à Terpsychore, voisinent sans problème avec des chansons
d'amour plutôt nostalgiques (Tu n'en
voulais pas). On notera aussi la seule chanson en anglais, It's Been A While, en duo avec Caitlin
Rose. L'insouciance est un vrai grand beau disque, un tremplin aussi vers
une grande carrière pour un artiste comme on en rencontre par ici, au mieux,
qu'une fois tous les dix ans.
C157
Ballade d'Alan Seeger - Chansons sur la Grande Guerre (2018)
Il se passe toujours de belles choses en
France. Dans le numéro 144 du Cri, j'avais présenté Ballade d'Alan Seeger – Chansons sur la grande guerre de BAPTISTE W. HAMON. Cet EP vient d'être
réédité chez Midnight Special Records avec l'addition d'une reprise de La chanson
de Craonne et une version vinyle (https://baptistewhamon.bandcamp.com).
Idéal pour célébrer le centenaire de la fin de la Grande Guerre, en attendant
le deuxième LP de Baptiste.
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