J'avais découvert
David Fakenham un peu par hasard, en 2009, grâce à une chronique de son album "Here
And Now" par l'estimable Jacques-Éric
Legarde (Xroads #18) qui sortait en l'occurrence quelque peu de son registre
habituel, plutôt dédié aux songwriters américains.
Un téléchargement et
quelques écoutes plus tard, j'étais moi aussi séduit par cet artiste mystérieux
mais dont le nom fleurait bon le pseudonyme, reposant sur un jeu de mots
bilingue.
Un dimanche soir à
Paris, c'était le 24 janvier 2010, David ouvrait à la Pomme d'Ève pour Bill
Morrissey dont ce devait, hélas, être la dernière apparition en nos contrées. Armé
de sa guitare en bois, un peu intimidé, le jeune homme nous donna un aperçu de
son talent dans un registre de folksinger, reprenant même avec brio "Ring
of Fire" de Johnny Cash (composition de June Carter et Merle Kilgore) et
démontrant une belle culture musicale, capable de se transformer de touche à tout de studio et de talent en troubadour capable de séduire son public
(malheureusement bien trop clairsemé) en face-à-face.
Il y a quelques
mois, après un single deux titres simplement intitulé "2 Songs"
destiné à faire patienter ses fans, il faisait entendre à quelques privilégiés
son nouvel enfant, "One Thing Remains" (doté d'une illustration qui
devait évoluer par la suite).
Ce nouvel
enregistrement avait encore une fois été réalisé, au départ, selon le principe du DIY.
David avait mis en boîte l'essentiel de ses contributions, chez lui, en août
2011. Et puis l'ami Matthieu Malon (Laudanum) était venu avec ses claviers pour
enjoliver quelques titres, Pierre Schmitt avait joué quelques parties de basse.
Après l'apport des amis et de la famille (Joao Lourenco à l'harmonica, Junior
Fakenham à la trompette, Marie Chevalot et Nine Fakenahm aux voix), il ne
restait plus qu'à mixer le tout, ce que Patrick Chevalot et David firent en
deux fois deux jours en février 2012.
Voilà pour
l'histoire du disque qui est, je le proclame, d'une grande qualité, ce que j'ai
ressenti dès la première écoute. Il n'est pas facile d'en parler sans s'en être
bien imprégné, car c'est un album qui se découvre petit à petit, que l'on ne
peut pas se contenter d'entendre distraitement en vaquant à d'autres
occupations.
La grande manie des chroniqueurs français, lorsqu'ils écrivent à
propos d'un de leurs compatriotes qui s'exprime en Anglais, c'est de vouloir à
tout prix faire des comparaisons. J'ai lu ici et là des évocations d'artistes
que je connais bien (Byrds, R.E.M., Neil Young) ou beaucoup moins bien, voire
très peu (Wilco, Lambchop) et je dois dire que tous ces parallèles ne me
semblent justifiés qu'en un point: la qualité, celle des mélodies mais aussi celle
du son car on a ici affaire à un "produit" qui ne sent pas du tout le
bricolage.
La seule référence
que je me permettrai ici est celle du duo franc-comtois Yules avec qui David
Fakenham partage une grande culture musicale (l'héritage familial sans doute)
et aussi ce goût pour la mélodie et les arrangements toujours justes, jamais
surabondants, jamais trop sophistiqués. C'est le travail d'artisans qui
remettent l'ouvrage sur le métier jusqu'à être satisfaits du résultat, c'est l'œuvre
de musiciens qui aiment la musique, tout simplement.
Pour évoquer plus avant
le contenu de "One Thing Remains", je dirai que c'est un disque qui
possède une ambiance (mais pas un disque d'ambiance, nuance), qui présente un
remarquable équilibre entre les morceaux, parfois d'une sombre beauté, parfois
plus légers, mais toujours prenants. Dès "Bones", le titre
d'ouverture, on comprend l'esprit dans lequel l'album a été réalisé, comment
les instruments se complètent les uns les autres, comment les claviers de
Matthieu Malon viennent apporter cette touche supplémentaire qui fait la
différence.
Au long des douze
plages, l'impression initiale est confortée, tout est juste, tout se met en
place petit à petit. C'est comme si David avait réalisé les fondations de
l'édifice, posé la première pierre avant que l'ensemble ne se mette à évoluer de
lui-même, mû par une énergie propre, entraînant le créateur autant que le
créateur ne l'entraîne. David confirme par ailleurs qu'il est un multi-instrumentiste de talent qui se double d'un chanteur inspiré et subtil, tout en délicatesse.
Il y a de vrais
moments forts dans cet ensemble finalement homogène et sans point faible. Mes favoris
sont "Nina", une ballade
émouvante, pleine d'âme et "You're My Woman", long morceau presque
épique porté par une guitare majestueuse. Il y a aussi les titres plus légers (au
moins dans les arrangements, mais pas dans la consistance) comme
"Beautiful Guitar", l'instrumental "27" ou "One Thing
Remains"qui permettent de maintenir une tonalité générale ne basculant pas
trop vers le côté sombre.
Je ne peux donc que
vous inviter à vous rendre sur le site de David pour tout savoir sur "One
Thing Remains", et notamment comment se le procurer (en téléchargement
uniquement pour l'instant).