mardi 18 septembre 2012

Louis Ville, en toute simplicité



Sur les pas de Louis Ville

Louis Ville, pour moi, c'est d'abord l'histoire d'une rencontre qui n'aurait jamais dû se produire. D'un côté, il y a le responsable de ces lignes: Sam Pierre (un pseudo), amateur de musiques américaines, fan de folk et de bluegrass, pour qui la chanson française se résume essentiellement à quelques grands noms, de Georges Brassens à Michel Jonasz, de Léo Ferré à Renaud, de Jacques Brel à Alain Souchon, de François Béranger à Richard Gilly. De l'autre, Louis Ville (un pseudo), auteur-compositeur-interprète d'origine vosgienne, totalement inconnu de ma personne et qui a pourtant déjà publié quatre CD (je ne l'ai appris qu'ensuite) et décrit par la presse comme un Arno français avec un côté Léo Ferré et quelques autres références. Rien de rédhibitoire pour moi, bien au contraire, mais à quoi bon s'intéresser aux copies quand on peut écouter tranquillement les originaux dans le confort de son salon, devant une bière ou un Perrier selon ses goûts.

Mais voilà, il y a Bar le Duc, charmante préfecture du vert département de la Meuse, qui organise chaque été les Dimanches du Parc dans les jardins de son hôtel de ville. Des concerts en plein air (gratuits) qui permettent d'entendre des artistes régionaux mais aussi d'autres à la renommée nationale ou même internationale. En ce dimanche 7 août 2011, Louis Ville était l'invité principal, précédé de Christophe Freyssac. Pas suffisant encore pour me motiver mais un élément important est venu emporter la décision: le soleil! Il faisait beau, sans quoi Louis me serait sans doute resté inconnu pour longtemps.

Une première partie agréable, et voici Louis Ville sur scène, dans ce kiosque à musique qui surplombe les chaises installées devant lui. Un grand escogriffe aux pieds nus, mélange de timidité et d'assurance mais qui, dès les premiers mots, dès les premières notes, dégage quelque chose de rare. Un côté authentique, une gentillesse un peu bourrue qui entraîne immédiatement la sympathie. C'est sans doute ce qu'on appelle le charisme. Le concert démarre, les titres s'enchainent, et l'impression initiale ne se dément jamais. Je cherche les références, forcément, je ne connais pas l'artiste! Arno? Ferré? Bien sûr, il reprend "Vingt Ans", mais à sa manière. Tout au plus, dans la construction de pas mal de chansons, je pense à Brel, pour l'utilisation du crescendo qui est une des marques de fabrique du grand Jacques. En fait, j'entends surtout un artiste original, aux textes très personnels. Les mots sont parfois très crus mais sans jamais tomber dans la vulgarité. L'humour est parfois délirant, parfois cruel mais la tendresse n'est jamais bien loin. Des titres découverts ce jour-là se sont gravés en moi, dès la première écoute: "Cruelle", "Marcello", "Le chanteur", "Sans rien dire", "Aime-moi"… Une corde casse, Christophe Freyssac prête sa guitare le temps de procéder à la réparation. Et quand il revient, Louis se fend d'un commentaire humble et admiratif devant la rapidité de l'opération. Le public, pas forcément fait seulement de connaisseurs, est "dans sa poche".


Et c'est déjà la fin du spectacle avec comme le vague regret de ne pas être allé rencontrer l'artiste, de ne pas être allé acheter "Cinémas", son plus récent CD. Mais il y a, et c'est un sentiment fort, la conscience d'avoir assisté à un vrai beau moment, d'avoir découvert un chanteur talentueux et authentique mais, avant tout humain. Une porte s'est refermée, c'est du moins ce que je crois.

En effet, quelques jours plus tard, dans un espace commercial à vocation culturelle au centre de la capitale de la Champagne (aujourd'hui hélas fermé), où je vais fréquemment flâner après ma matinée de travail, j'ai la bonne surprise de découvrir "Cinémas" et, cette fois, je n'hésite pas. J'éprouve bien sûr l'appréhension de ne pas retrouver sur CD la magie du concert, où Louis était seul avec sa guitare. Sur le disque, peu de monde, mais une variété d'instruments assez grande, Louis en assurant lui-même une grande partie. Le son est différent, mais le charme opère néanmoins: Louis Ville est vraiment entré dans ma vie musicale, et l'envie d'en découvrir plus est là.

Facebook et le hasard font le reste et ce grand réseau pas toujours social joue en l'occurrence pleinement son rôle. Il permet de belles rencontres, des échanges sur des passions communes. Et puis il permettra vite à Louis Ville de faire savoir que ses trois premiers albums étaient réédités, et à moi de les acheter, puis de constater sa gentillesse et sa disponibilité quand je lui demanderai quelques informations sur lesdits albums.


En plus des CD, il y a de "De beaux riens", un recueil de textes paru aux éditions Strapontin{s}. Un beau petit livre, bien illustré, avec quelques lignes d'amis qui en révèlent beaucoup sur le personnage et, entre les lignes, plus encore sur l'homme qui se cache derrière l'artiste.

Quelques mois passent. J'ai quelques échanges avec Louis. J'aimerais parler de lui sur mon blog, de son dernier disque, à l'occasion de sa réédition ("Cinémas", augmenté de "Moteur!", un disque bonus). Le principe d'une interview est posé. Facebook toujours, Louis annonce ses concerts à venir et, ô surprise, je vois au programme un "Chant' Appart" programmé le samedi 16 juin 2012, à quelques dizaines de mètres de l'endroit où je passe mes weekends. Il s'agit en fait d'un concert à la maison (les house concerts sont très prisés des artistes folk anglo-saxons mais moins répandus par ici) organisé par et chez des amis de Louis Ville. Nous décidons de nous rencontrer un peu avant afin d'échanger, de mieux faire connaissance. Et je bénéficie par la-même d'une invitation pour le show.

Louis n'est pas seul. Il y a Yvanna. Et rien qu'aux regards qu'ils portent l'un sur l'autre, je comprends l'importance de cette présence. L'interview commence et devient vite une conversation à bâtons rompus avec un vague fil conducteur, sans magnéto, juste quelques notes.

Louis parle de son enfance vosgienne, près de Remiremont, la cité des Abbesses, dans une famille de cinq enfants, de ses parents qui lui ont appris la tolérance, l'ouverture et qui ont permis son émancipation rapide. À 17 ans, Louis (qui ne s'appelle pas encore ainsi) quitte la maison pour découvrir le monde, avec une guitare payée par un premier job d'été. Il prend le chemin de Paris puis des Alpes, va de petit boulot en petit boulot.

Louis avait commencé en musique avec la trompette d'harmonie. Son adolescence avait été bercée par les Stooges, David Bowie, les Rolling Stones. Pur autodidacte, il avait commencé à 12 ou 13 ans dans ses premiers orchestres de rock garage. Et puis ce fut un groupe de jazz-rock, nécessitant beaucoup de travail (le travail bien fait, encore une valeur héritée de ses parents), et la vague punk.

Arrive ensuite la période Do It, vers la fin des années 80, un groupe de rock british influencé par le mouvement punk mais, surtout, par le Dr. Feelgood de Wilko Johnson et Lee Brilleaux. Quelques années plus tard, Louis commence à écrire en français et se juge lui-même, en ce domaine, "honorable". Il envisage alors de tenter l'aventure en solo, afin d'explorer de nouveaux territoires plus personnels, et aussi d'éviter les problèmes d'égo qui ne manquent jamais de survenir au sein d'un groupe qui dure. Le virage est donc pris, définitivement, vers la fin du deuxième millénaire, avec la parution de l'album "Hôtel pourri".

Je demande à Louis quelles sont ses influences. Le rock, bien sûr, Jacques Brel, Léo Ferré mais aussi, de manière plus surprenante, Marianne Oswald, chanteuse et actrice née en Moselle (alors allemande), qui a eu son heure de gloire, comme chanteuse, avant la deuxième guerre mondiale, chantant notamment des textes de Jacques Prévert. Louis a repris un de ses succès "La chanson de Kesoubah", écrit par jean Tranchant, sur son album "À choisir" en 2006.

Ce qui est certain, c'est que ces influences ont réussi à se fondre pour créer une personnalité unique. Pour ma part, si l'on excepte le crescendo "brélien" qui m'avait frappé en concert, je ne sens aucun tic piqué à un autre artiste. Et Louis est conscient de parfois abuser du crescendo et cherche à lutter contre cette tendance (qui est plus marquée quand il est en concert, seul avec sa guitare). Je retrouve cependant en lui quelque chose du grand François Béranger, cette sincérité d'écorché vif, cette capacité à faire se rejoindre le rock et la chanson réaliste.

Autre question: comment se faire connaître sans renier ses valeurs à une époque où cela n'est pas facile? Peut-on encore vivre de son art? Pour Louis, il y a d'abord la scène: 80 concerts par an, dans un périmètre qui s'élargit: Paris, la Provence, Toulouse, l'Allemagne… Des fidèles qui propagent le message par le bouche à oreille. Et puis du culot, de l'ambition, une capacité à conjuguer passion et talent. La radio et la TV chaque fois que c'est possible. Des coups de main, comme ceux que lui a donnés Jean-Louis Foulquier qui a cru en lui dès le début. Et internet, formidable fenêtre ouverte sur un monde qui sommeille et ne demande qu'à s'éveiller pour peu que ce qu'on lui propose en vaille la peine. Quant à la presse écrite nationale, petit à petit, elle est séduite par notre ami et, dans la quasi-totalité des cas, élogieuse.

L'artiste qui galère pendant des années pour vivre de ce qu'il aime ne peut pas y parvenir seul. Pour Louis, il y a eu la rencontre avec Yvanna, qui croit en lui plus encore qu'il ne croit en lui-même. Une véritable complémentarité s'est instaurée entre eux, permettant à l'auteur-compositeur-interprète de se concentrer sur son art, sans se soucier des aspects matériels, de la promotion et de toutes ces choses qui dévorent l'énergie. Louis a retrouvé une véritable confiance, celle qu'Yvanna a en lui et qu'elle lui a transmise. Une heure avec ces deux-là, à observer, sans pour autant échanger beaucoup de mots, permet de comprendre tellement de choses. Yvanna, c'est aussi elle qui est à l'origine des clips (et du concept des disques "Cinémas" et "Moteur!"), si bien mis en scène et si bien réalisés, qui nous régalent sur la toile. Une bien belle cohérence dans cette démarche.

Sur sa discographie (détaillée plus bas), Louis Ville dit ne rien regretter, n'avoir honte de rien. En un peu plus d'une décennie, il y a eu une évolution, une maturation. Depuis "Hôtel pourri", les révoltes se sont apaisées. Il y a eu un cheminement, la vie n'est plus vue de la même façon. Louis Ville dit: "J'observe mon âme". Sa principale source d'inspiration est l'être humain: les amours, la bêtise humaine, les méandres, les travers de nos congénères, et de nous-mêmes. Il ne se considère pas comme un poète. Il aime le travail bien fait, celui d'un artisan, à la manière d'un Brassens, sans pour autant s'interdire les fulgurances poétiques, fussent-elles malhabiles, qui le rapprocheraient plus d'un Brel ou d'un Ferré. La sincérité, l'authenticité, resteront toujours pour lui des valeurs fondamentales, le socle sur lequel son œuvre se construira. Sur l'aspect musical, Louis se défend d'être un virtuose de la guitare comme l'ont écrit certains. Il a (bien) digéré des influences diverses pour forger une personnalité unique. "Ils se trompent, je fais ce que j'ai envie d'entendre", conclut-il, en résumé.

Une observation personnelle: peu après l'entretien et le concert "Chant' Appart", un déplacement professionnel assez long m'a permis d'écouter en roulant la quasi-totalité (dans l'ordre) des titres publiés par Louis Ville. Petit à petit j'ai été frappé par l'étonnante unité de l'ensemble. Des titres différents en apparence, avec des orchestrations variées, reposent sur quelque chose de commun qui apparaît d'abord comme quelque chose d'un peu bancal, une petite musique intérieure, un rythme souvent marqué par des percussions ou des cordes de guitare qui claquent et qui, en fait, constituent ce que j'appellerai le style Louis Ville, qui fait de lui quelqu'un de véritablement unique, car c'est le style qui fait l'artiste.


Sur la réédition de "Cinémas", le disque bonus était-il juste un coup commercial? "Non", se défendent en chœur Yvanna et Louis, "le disque étant épuisé, nous avons eu envie d'offrir quelque chose de plus". Ce quelque chose, c'est trois titres en duo avec des amis (Mell, François Pierron, Marcel Kanche) ainsi qu'un titre de et en hommage à la trop jeune disparue Danielle Messia. C'est en fait vraiment un cadeau, aussi bien pour les amis musiciens que pour les admirateurs.

Pour la scène, Louis Ville a envie de sortir de la formule solo, trop limitée, et de faire le maximun de concerts en formule trio (avec Mell à la batterie et François Pierron à la contrebasse). Quant au prochain album, il est à l'écriture et espéré pour le printemps 2013.

Bientôt, c'est l'heure du "concert à la maison", chez Dominique et Corinne que je ne remercierai jamais assez de nous avoir invités pour ce qui était une fête familiale et amicale. La météo étant cette fois défavorable, le garage se transforma en salle de concert. Après tout, c'était un retour aux sources pour Louis… En tout cas, ce fut pour la vingtaine de personnes présentes un bien beau moment de musique et de chaleur humaine, et Louis donna encore beaucoup de lui-même, avec son talent, et ce trac perceptible qui l'aide à se magnifier. Même en terrain conquis, il n'envisage pas de ne pas donner le meilleur de lui-même. Bien sûr, ce fut trop court. Mais un tel cadeau, c'est forcément un grand souvenir.


Titres chantés par Louis Ville  à Chant' Appart, le 16 juin 2012
Cruelle
Il y a toi
Claudia
L'amour
Ne te retourne pas
L'Égyptienne
Et un
Épousez-moi
Hôtel pourri
De beaux rien
L'étincelle
Mr. Follow
Embrasse-moi
Y'en a marre
Le chanteur
Marcello
À choisir
Les ours
On maquille tout
L'amour (encore)

Discographie


Hôtel pourri (1999)
  1- T'as qu'à venir (Louis Ville)
  2- Hôtel pourri (Louis Ville)
  3- Fantasmes (Louis Ville)
  4- Schyzo (Louis Ville)
  5- Merde (Louis Ville)
  6- Le temps (Louis Ville)
  7- Leçon de choses (Louis Ville)
  8- Fantôme (Louis Ville)
  9- Sister (Louis Ville)
10- C... n'aime pas les dimanches (Louis Ville)
11- Kiki (Louis Ville)
12- Last one (Louis Ville)
      Les Amants de St Jean (León Angel / Émile Carrara)
Avec Patrice Hue / Daniel Hue / Élizabeth Schaffer


Une goutte (2003)
  1- Aime-moi (Louis Ville)
  2- La lune (Louis Ville)
  3- Aujourd'hui (Louis Ville)
  4- Dis-le moi (Louis Ville)
  5- Pour tout ça (Louis Ville)
  6- Du bruit (Louis Ville)
  7- Et un (Louis Ville)
  8- Sa voix (Louis Ville)
  9- Cruelle (Louis Ville)
10- BBB ta femme (Louis Ville)
11- Une goutte (Louis Ville)
12- Comme chaque fois (Louis Ville)
13- La dernière fois (Louis Ville)
14- Ploc Ploc (Louis Ville)
Avec Patrice Hue / Sylvain Legros


À choisir (2007)
  1- L'amour (Louis Ville)
  2- Sentimentale (Louis Ville)
  3- Y'en a marre (Léo Ferré)
  4- La complainte de Kesoubah (Jean Tranchant)
  5- A choisir (Louis Ville)
  6- Loli (Wilfried de Paris / Louis Ville)
  7- L'etincelle (Louis Ville)
  8- Attends-moi (Richard Rognet / Louis Ville)
  9- Les ours (Louis Ville)
10- Il le sait (Louis Ville)
11- L'ange (Louis Ville)
12- Nicolas (Louis Ville)
Avec Sylvain Legros / Patrice Hue / François Pierron / Daniel Hue / Pierrot Moïoli / Bédette Ladener


Cinémas (2011)
  1- Ne te retourne pas (Louis Ville)
  2- Il y a toi (Louis Ville)
  3- Cruelle (Louis Ville)
  4- Sans rien dire (Louis Ville)
  5- De beaux riens (Louis Ville)
  6- Embrasse-moi (Louis Ville)
  7- Épousez-moi 1 (Louis Ville)
  8- Épousez-moi 2 (Louis Ville)
  9- 20 ans (Léo Ferré)
10- Marcello (Louis Ville)
11- L'Égyptienne (Louis Ville)
12- Tes yeux (Louis Ville)
13- Le chanteur (Louis Ville)
Avec Albert Boutilier / Patrice Hue / Ree Dong Thi


Moteurs! (2012, disque bonus)
1- Hôtel pourri (Louis Ville) en duo avec Mell
2- Attends-moi (Richard Rognet / Louis Ville) en duo avec Marcel Kanche
3- Schyzo (Louis Ville) en duo avec François Pierron
4- De la main gauche (Danielle Messia / Jean Fredenucci)

En conclusion, j'ai juste envie d'emprunter ces mots à un de ses amis, Fab (sur le recueil "Des beaux riens"):
"Un torrent de gré rose roule dans son accent
Sa guitare est taillée dans un sapin ...
Ses chansons ont la force des hivers rudes..."

jeudi 24 mai 2012

Dedicated to Robin Gibb

Les chroniques de "Bee Gees 1st", "Horizontal", "Idea" et "Odessa" (écrites à l'origine pour le magazine Xroads) ont été publiées sur ce blog en hommage à Robin Gibb dont la voix et les compositions - comme celles de ses frères - ont bercé mon adolescence, sans que jamais je ne m'en lasse jusqu'à ce jour.


22 décembre 1949 - 20 mai 2012

Salut, l'artiste...




Bee Gees – Idea (1968)

Paru dans Best of Crossroads "1960-1968 - 100 albums essentiels"


BEE GEES
Idea
Polydor (Europe) / ATCO (USA) août 1968

Début 1968, avant même la sortie de "Horizontal", les Bee Gees sont de retour en studio. Des premières sessions, résultent quelques titres dont deux constitueront leur prochain single: "Jumbo" et "The Singer Sang His Song". Robert Stigwood, leur manager n'était pas vraiment favorable à cette publication qui fut en fait un semi-échec (le premier titre, paru initialement en face A est vite passé en face B sans que cela change quoi que ce soit) malgré la qualité indéniable de "The Singer Sang His Song" ». 


L'enregistrement de "Idea" marqua encore des évolutions. Des problèmes d'ego commençaient à se faire jour et la conception même du groupe évoluait, les trois frères (et leur management) entendant de plus en plus en garder seuls la direction. Cela n'empêchait en rien la créativité comme le démontre cet album, riche et varié mais un peu inégal. Encore une fois, deux singles vont vampiriser l'ensemble: "I Started A Joke" et "I've Gotta Get A Message To You". Le premier mérite qu'on le considère comme autre chose que le tube qu'il a été et qui lui vaut de toujours passer régulièrement en radio. La mélodie de cette composition de (et chantée par) Robin a été inspirée par le bruit du moteur d'un avion (!); quant au texte, il vaut qu'on y prête plus d'attention tant il est un exemple parfait de ce que savent faire les frères Gibb, alliant la concision à un grand pouvoir de suggestion. Le second est pour moi le meilleur titre publié par les Bee Gees dans les années 60. Encore une fois, le texte, écrit du point de vue d'un condamné dans le couloir de la mort, dépasse de loin tout ce qu'on peut entendre sur les radios à l'époque, la mélodie est imparable, mais que dire des harmonies? Le souci du détail et l'inventivité sont tels que, au bout de dizaines d'écoutes, on découvre encore de nouvelles choses. La ligne mélodique de basse de Maurice (fortement inspiré par le jeu de Paul McCartney) est elle aussi particulièrement remarquable, même si elle est moins mixée moins en avant dans la version de l'album (à noter que le titre ne figurait pas sur la version originelle du 33 tours paru en France). 


Globalement, par rapport à son prédecesseur, l'album a un côté moins mélodramatique, l'orchestre de Bill Shepherd est plus en retrait. Pour la première fois, un titre est chanté par un membre extérieur à la fratrie, puisque c'est Vince Melouney qui interprète son propre "Such A Shame" (il confessera plus tard regretter de n'avoir pas laissé Barry, qui le souhaitait, le chanter à sa place). La ballade "In The Summer Of His Years", superbement interprétée par Robin, est dédiée à Brian Epstein, ex-manager des Beatles, par ailleurs ami et partenaire en affaires de Robert Stigwood. 

Quelques incursions vers le rock ont produit le sautillant "Kitty Can" (avec les harmonies de Maurice et Barry) et "Idea", influencé par Mick Jagger, où la guitare de Vince est en évidence et le chant de Barry partuculièrement inspiré. L'album se termine par "Swan Song", au titre prophétique. À la parution de l'album, le groupe était déjà parvenu à une autre étape de son évolution. Des concerts aux USA étaient annulés, Vince Melouney quittait le groupe, à l'amiable, et les Bee Gees, profitant du temps libre, étaient déjà en studio pour un projet ambitieux, un double album intitulé "Master Peace", qui fut finalement publié sous le titre "Odessa". Mais ça, c'est une autre histoire.

Sam Pierre

 Post scriptum:

La réédition en double CD de Rhino Records présente les mêmes caractéristiques que pour les albums précédents.


Le premier CD propose les versions mono et stéréo du LP original et le second des titres bonus au premier rang desquels le single "Jumbo" / "The Singer Sang His Song" et la version (mono) du 45 tours "I've Gotta Get A Message To You"


"Idea","Kitty Can" et "Let There Be Love" sont présents avec un mixage différent. Les vrais inédits sont plus anecdotiques. Parmi eux on note un instrumental, une espèce de sketch (un travail en progression, pas même une démo) et deux courts spots publicitaires pour Coca Cola. Rien de transcendant, certes, mais beaucoup de plaisir pour les amteurs des Bee Gees des premières années.

mercredi 23 mai 2012

Bee Gees – Horizontal (1968)

Paru dans Best of Crossroads "1960-1968 - 100 albums essentiels"



BEE GEES
Horizontal
Polydor (Europe) / ATCO (USA) Janvier 1968

Dès la parution de leur premier album, en juillet 1967, les Bee Gees ont vu leur vie changer, se transformer en un tourbillon de promotion entre presse écrite, radio et télévision, ce qui ne les a pas empêchés de retourner à ce moment en studio pour préparer leur nouvel album. 


Ces sessions, qui durèrent quatre mois furent particulièrement fructueuses et donnèrent naissance à trois singles qui atteignirent les sommets des charts: « Massachussets » (« Barker Of The UFO » en face B), « World » (« Sir Geoffrey Saved The World » en face B) et « Words » (« Sinking Ship » en face B). En France, il y eut aussi « And The Sun Will Shine » couplé avec « Really And Sincerely », deux titres chantés par Robin. « Massachussets », paru en septembre 1967, fut le premier numéro 1 du groupe en Grande Bretagne et changea totalement la perception que le monde avait des frères Gibb, devenus d'un seul coup des challengers crédibles pour leurs glorieux ainés. 



Mais il serait trop réducteur de ne voir en eux qu'une usine à tubes. En effet, l'abum Horizontal, qui reprend « Massachussets » et « World », marque un pas en avant dans la mesure où les trois frères et leurs deux complices expérimentent de nouveaux sons, de nouveaux arrangements, sonnant vraiment comme un groupe où chacun apporte sa contribution. Les titres « And The Sun Will Shine » et « Really And Sincerely » mettent en valeur la voix de Robin dans son registre favori, celui des ballades mélancoliques et donnent un avant-goût de ce que sera le début de sa carrière solo. D'autres morceaux privilégient en revanche les harmonies, c'est le cas de « Day Time Girl », aux racines folk médiévales et de « Horizontal » dont les accents psychédéliques clôturent l'album. 

(photo de la pochette inversée dans l'édition américaine)

« The Change Is Made » confirme la passion de Barry et ses frères pour le R&B de Stax et Otis Redding, alors que « Lemons Never Forget » est sans doute la meilleure réussite des Bee Gees dans le registre du rock électrique, au même titre que « The Ernest Of Being George ». Pour compléter, trois titres plus légers trouvent leur place dans l'ensemble: « Birdie Told Me », « With The Sun In My Eyes » et « Harry Braff ». 

La réussite de cet album, en dehors des qualités déjà connues des compositions et des harmonies vocales, repose aussi sur l'accompagnement orchestral confié à Bill Shepherd. Et il ne faudrait surtout pas mésestimer  la contribution de Maurice, le moins médiatique des frangins, mais celui qui apporte le liant sans lequel on ne pourrait pas parler de groupe. 

Avec cet album, les Bee Gees étaient définitivement entrés dans la cour des grands. Il est dommage qu'à l'époque on se soit trop focalisé sur leurs singles parce que Horizontal démontre de bout en bout qu'ils savaient faire autre chose, au même niveau que les Beatles et les Beach Boys (l'admiration mutuelle entre ces trois groupes était et est restée une réalité), par exemple. Mais quand on sait que la face A du 33 tours original commençait par « World » et la seconde par « Massachussets », on peut comprendre que beaucoup n'aient pas eu envie d'aller plus loin que ces deux extraordinaires réussites, artistiques aussi bien que commerciales. 

Les Bee Gees étaient-ils un groupe pour "minettes" comme on l'écrivait en France ou un groupe underground comme les voyaient les Américains? À chacun sa réponse…

Sam Pierre

Post scriptum

Après Bee Gees 1st , Horizontal bénéficie d'une superbe réédition en double CD chez Rhino Records.


Même principe pour le premier disque, les 12 titres sont présentés en version stéréo puis en version mono. Double plaisir garanti.

Le second disque est particulièrement intéressant et nous offre quatre compositions inédites des frères Gibb: « Out Of Line », « Ring My Bell », « Deeply, Deeply Me » et « Mrs. Gillepsie's Refrigerator ». Il y a aussi 3 chansons de Noël (2 compositions originales et un medley). On trouve encore une version alternative de «Really And Sincerely » ainsi que de « Swan Song » (le titre qui clôturera l'album Idea.

Et puis, cerise sur le gâteau, il y a quatre titres parus uniquement en 45 tours ou sur des compilations: « Barker Of The U.F.O. », « Words », « Sir Geoffrey Saved The World » et « Sinking Ships ».



mardi 22 mai 2012

Bee Gees 1st (1967)

Paru dans Best of Crossroads "1960-1968 - 100 albums essentiels"


BEE GEES
Bee Gees' 1st
Polydor (Europe) Juillet 1967 / ATCO (USA) Août 1967

Lorsque les frères Gibb (Barry, 20 ans, et les jumeaux Maurice et Robin, 17 ans), débarquèrent en janvier 1967 pour conquérir Angleterre, leur pays natal, ils étaient loin de se douter de ce que l'avenir leur réservait. Les Bee Gees étaient célèbres en Australie où ils avaient publié onze singles et deux albums entre 1963 et 1966, tout en tenant la vedette de shows radio très populaires là-bas. 

Ces fans inconditionnels des Beatles (mais aussi des Beach Boys, de Ray Charles, d'Otis Redding et de l'écurie Stax), lassés des inévitables comparaisons, avaient vite fait évoluer leur style, délaissant les guitares électriques au profit d'orchestrations moins rock. Car leur domaine, c'était avant tout la mélodie. 

Un premier single, en avril, les révéla au monde ébahi. Ce « New York Mining Disater 1941 », inspiré par une catastrophe minière les mit en lumière, suscitant un grand intérêt des deux côtés de l'Atlantique. Bee Gees' First parut en juillet et démontra que le groupe n'était pas seulement une éphémère machine à tubes comme l'industrie musicale en produisait plusieurs chaque mois. C'était un véritable album, du niveau de Revolver, dans sa conception comme dans sa diversité (les deux albums bénéficiaient d'ailleurs d'un artwork du même Klaus Voorman. 


 Bien sûr, les détracteurs se firent très vite entendre. Pensez-donc! À l'époque où l'on ne pouvait pas aimer à la fois les Beatles et les Rolling Stones, il n'était pas de bon ton de s'écarter des sillons tracés par les maîtres. Et l'on comparaît inévitablement les prétendant à l'un ou l'autre. En la bonne France du gaullisme finissant, dans la presse "rock", on parlait au mieux de variété, au pire de guimauve. 

C'était là vraiment passer à côté de quelque chose de grand. Bien sûr, les Bee Gees n'étaient pas un groupe de rock et c'était là leur grand crime. Ils étaient des mélodistes exceptionnels, leurs textes teintés de surréalisme volaient largement au-dessus de la moyenne du genre (que l'on mesure le chemin parcouru depuis « The Three Kisses Of Love », leur premier single de 1963), leurs harmonies vocales, fraternelles, ne ressemblaient pas à ce que l'on pouvait entendre par ailleurs (sauf quand ils avaient envie de ressembler aux Fab Four), mais rien n'y faisait. Très vite, sous peine de perdre sa crédibilité "rock", il allait falloir (en France en tout cas) mépriser les frères Gibb. 

Mais revenons-en à l'album, car il s'agit d'un véritable album, pas d'une suite de tubes avec quelques morceaux en plus pour remplir. On sent les influences, les Beatles, bien sûr avec « In My Own Time », Otis Redding avec « One Minute Woman »; « Please Read Me » (avec la première apparition d'harmonies falsetto) a été, selon Barry, inspiré par Brian Wilson et interprété à la mode Beatles. Et puis il y a les monuments. Les singles « New York Mining Disaster 1941 », génial de simplicité, « Holiday », le premier slow, et « To Love Somebody ». Ce dernier titre avait été écrit à l'origine pour Otis (qui périt avant de l'enregistrer) et, s'il n'obtint qu'un succès modeste en Grande-Bretagne, il fut en revanche très populaire aux USA. C'est le titre le plus adapté des Bee Gees: on peut citer Janis Joplin, Nina Simone, Eric Burdon (avec les Animals), Gram Parsons (avec les Flying Burrito Brothers)… Excusez du peu. 


 J'évoquerai encore « I Can't See Nobody » et l'extraordinaire partie vocale de Robin ou « Every Christian Lion Hearted Man Will Show You » qui démarre par des chants grégoriens soulignés par une ligne de mellotron. Et quand l'album s'achève par « Close Another Door », on sait que le trio (avec ses deux acolytes Colin Petersen et Vince Melouney) vient en fait d'ouvrir en grand les portes d'un succès durable en même temps qu'il a popularisé, à la même époque que les Moody Blues, ce que l'on aurait pu appeler le prog-pop.

Sam Pierre

Post scriptum

"Bee Gees 1st" a bénéficié en 2006 d'une réédtion chez Rhino Records avec un nouveau package luxueux, un son superbe et un livret fourmillant de détails, de commentaires et de photos inédites.


Le contenu est également très riche, puisque "Bee Gees 1st" est ici présenté en double CD. Le premier disque reprend les 14 titres de l'album original, en versions stéréo et mono. Même si la chose n'est pas d'un intérêt primordial en apparence, l'auditeur attentif notera, entre les deux mixages, des différences qui méritent de s'y attarder.

Le second disque propose 14 titres supplémentaires, jamais publiés jusque-là, dont 5 totalement inédits, les autres étant des versions alternatives de certaines chansons de l'album (dont deux pour le hit "New York Mining Disaster 1941". Des morceaux comme "House Of Lords" ou "Mr. Wallor's Wailing Wall" sont d'un niveau qui leur aurait permis de figurer dans la sélection finale.


La légende était en marche. Près de quarante-cinq ans après sa parution, alors que Barry Gibb est désormais seul à porter le flambeau familial, j'invite ceux qui pensent que les Bee Gees étaient un groupe disco à découvrir "Bee Gees First" et tout ses trésors...

lundi 21 mai 2012

Bee Gees – Odessa (1969)

Chronique parue dans Xroads #16 (février 2009)




BEE GEES *****
Odessa (Special 40th Anniversary Edition)
Reprise : Rhino Records
Attention, chef d'œuvre!

Les frères Gibb tiennent une place à part dans ma relation avec la musique et Odessa est le disque avec lequel tout a vraiment commencé. Les Bee Gees avaient, depuis 1967, enchaîné tube sur tube sans jouir, en France du moins, de la réputation qu'ils méritaient: groupe pour minettes, tout juste bons à animer les booms du samedi soir, ils étaient méprisés dans notre pays. Dans le même temps, les Allemands les considéraient comme supérieurs aux Beatles et les Américains les classaient parmi les groupes underground. 

Pour beaucoup, ils ne sont remémorés aujourd'hui que comme un groupe disco alors qu'ils n'ont en fait amorcé vers 1976 qu'un virage funky récupéré par la fièvre du mouvement disco. Mais c'est une autre histoire. 

Revenons à l'été 1969. Neil Armstrong marche sur la lune, Jimi Hendrix met le feu à Woodstock et les Bee Gees explosent en plein vol, peu après la parution de leur grand œuvre: Odessa. Trop de succès, trop jeunes (à l'époque, les jumeaux Robin et Maurice n'ont pas 20 ans), des égos qui enflent et génèrent des conflits ingérables. Vince Melouney, le guitariste part "à l'amiable" pour divergences musicales (il a une sensiblité blues-rock alors que les frères Gibb veulent garder une orientation plus commerciale); Colin Petersen, le batteur, est débarqué sans ménagement. Bref clap de fin, provisoire. Et Odessa, le dernier grand album des sixties, même si peu le savent, tente de tracer sa voie, incompris.


40 ans après, cet album reçoit enfin le traitement qu'il mérite, grâce à Rhino Records (qui avait déjà soigné de la même façon les trois premiers albums du groupe). Un contenant digne de l'original (pochette en velours rouge et lettres d'or) avec un livret passionnant à feuilleter. Du contenu, on peut discuter. Rien à dire (si ce n'est du bien) sur le premier CD: c'est l'original (exhaustif, la version européenne disponible du CD faisait l'impasse sur un morceau orchestral), remastérisé, avec un son époustouflant. Le deuxième CD est plus discutable (pour moi, tout à fait dispensable): c'est le même disque en version mono. Quant au troisième, c'est évidemment celui qui ravira les fans. 23 titres: 16 des 17 originaux (seul manque « The British Opera ») sont présentés en versions alternatives (démo, alternate mix ou alternate version), presque toujours intéressantes. Je retiendrai surtout « Barbara Came To Stay », première version de « Edison », la démo de « Lamplight », sans l'introduction chantée en Français ("Allons viens encore chérie / J'attendrai an après an / Sous la lampe dans la vieille avenue"), la version vocale de « With All Nations (International Anthem) », la démo de « Black Diamond » qui nous montre bien comment un titre peut évoluer jusqu'à sa version finale. Et puis il y a les 2 vrais inédits, « Nobody's Someone » et « Pity », tous deux chantés par Barry, qui ne déparent pas l'ensemble. 



Mais revenons à l'album original qui confirme magistralement le savoir-faire et le talent de Barry, Robin & Maurice Gibb. On connaît leur sens de la mélodie, incomparable. On apprécie leurs harmonies à trois voix qui suscitent même l'admiration d'un expert tel que Brian Wilson. On ignore en revanche trop leurs qualités de lyricistes: les textes sont souvent originaux, tant dans les thèmes abordés que dans la forme, réellement poétiques, et jamais mièvres, même quand ils sont simples. Et avec Odessa, on découvre leur capacité à aborder des styles musicaux très différents. Des titres à la dimension épique, comme « Odessa (City On The Black Sea) » (plus de 7'30"), « Black Diamond »; des morceaux à la coloration country (« Give Your Best ») ou rock (« Marley Purt Drive ») et ces petits chefs d'œuvre d'harmonie et de mélodie que sont « Edison » ou « Melody Fair ». Je ne citerai pas tout. Il y a encore trois titres orchestraux, et puis le seul qui a eu l'honneur des hits, « First Of May », pas le meilleur choix, sans doute. Ce choix, non admis par Robin qui eut préféré qu'il portât sur "son" « Lamplight » rétrogradé en face B, précipita d'ailleurs le split du groupe. 

Quoi qu'il en soit, il n'est pas trop tard pour découvrir Odessa, loin du contexte qui a présidé à sa sortie originelle. Pour moi, ce disque mérite 5 étoiles (et même 6 si c'était possible). Si je ne lui en donne finalement que 4, c'est parce que son contenu est trop copieux: on n'est certes pas obligé d'écouter la version mono, mais son inclusion n'est pas neutre sur le prix, qui rebutera sans doute les non-inconditionnels du groupe, de ce superbe objet.

À classer près de Revolver, Aftermath, Arthur et Highway 61 Revisited, autres grands albums des sixties.

Sam Pierre

mardi 17 avril 2012

Le Cri du Coyote #128


Il est paru. Passionnant, comme d'habitude. L'interview de Christian Séguret est un petit monument. J'ai appris beaucoup sur ce Monsieur, un grand musicien que je connaissais surtout de réputation.

Dans "Disqu'Airs", parmi d'autres, mes chroniques: Chip Taylor, Steve Parry, Randy Thompson, Otis Gibbs, Indio Saravanja, Charlie Parr, The Far West, JD Fox & Sunset Travelers, David Rodriguez, Darrell Scott, Rachel Harrington, BettySoo & Doug Fox (aka Across The borderline), Jenai Huff, Katy Boyd (solo et avec Marty Atkinson).

Il n'y a jamais eu autant de bonne musique... ni de bonne lecture, pour les deux mois à venir...

Abonnement: 27 Euros pour 1 an / 6 numéros (32 euros pour les bienfaiteurs) par chèque à l'ordre de "Le Cri du Coyote"

Le Cri du Coyote
BP 48
26170 BUIS LES BARONNIES
cricoyote@orange.fr

jeudi 12 avril 2012

Joe Phillips, le Chat Sauvage de Massena, NY

Joe Phillips ou la réalité de l'Art

Qu'ont en commun Randy Burns, Mark Brine, Tom Rapp (Pearls Before Swine), Ed Askew, Carolyne Mas, Tim Robinson, R.C. O'Leary, Shane Murphy, Bop Tweedie, Gary Hall, John Schindler, Paul Hubert, Jerry Short, Forrest Harlow, John Coster, Scott Severin, Bill Chinnock, Steve "Turbo" Thompson, Christian Parker? Le talent, bien sûr. Mais par dessus-tout, ils sont les amis de Joe Phillips et ont vu leurs oeuvres publiées ou distibuées par le label WildCat Recording Company. (photo ci-dessous: Tim Robinson, Joe Phillips, Mark Brine).


Nous sommes loin des majors et de leur souci de rentabilité, de leur gigantisme déclinant. WildCat Records est une petite structure et sa raison d'être, "the reality of art", résume parfaitement l'attitude de Joe vis-à-vis de la musique et du business, deux notions bien éloignées à ses yeux. Joe est une espèce d'extraterrestre, quelqu'un à qui la musique n'apportera jamais la fortune, mais plutôt des soucis et des moments de découragement. L'amour de l'art, voici ce qui l'anime depuis bien longtemps, depuis qu'il officiait comme ingénieur du son du légendaire label ESP Disk où il a connu Tom Rapp, Randy Burns et Ed Askew, qui sont restés, depuis plus de quarante ans, ses amis. L'amitié est le deuxième moteur de Joe Phillips. Tous les artistes qu'il produit ou distribue sont ses amis, et ce n'est pas Randy Burns (à droite sur la photo ci-dessous) qui va me démentir.


Carolyne Mas pourrait également témoigner. Elle eut son heure de gloire (en Europe surtout) dans les années 80, fut surnommée la Bruce Springsteen en jupons, avant de cumuler des coups du sort qui l'ont mise dans de grandes difficultés financières. Qui est là pour l'aider, rééditer certains de ses enregistrements? Joe Phillips! Mais Joe est un maniaque, quelqu'un qui ne se contente pas de transférer les vieilles matrices sur un nouveau support. Il retravaille, remet l'ouvrage sur le métier jusqu'à ce qu'il obtienne le son qu'il juge parfait, la chaleur du vinyle, comme par exemple pour "The Vinyl Collection" de Carolyne, déjà un collector avant même d'être disponible en format physique. Une petite visite chez WildCat Records s'impose (et il est fortement recommandé d'y faire ses emplettes - satisfaction garantie).

Mais Joe Phillips est aussi un artiste à part entière, un singer-songwriter qui a mis sa carrière entre parentèses pour mieux se conacrer à la musique des autres. On peu le voir ici, armé de son autoharpe, en 1993.


Joe Phillips (c'est un pseudo) a des ancêtres français qui ont traversé l'Atlantique il y a quelques siècles, a vécu au Québec et garde en conséquence un amour certain pour notre petit pays. Sans atteindre la gloire internationale, il s'était fait une jolie réputation de performer dans les années 80 et 90, produisant par ailleurs quelques albums aujourd'hui évidemment introuvables. Seul "Postcard From Nashville" était disponible en téléchargement jusqu'au début du printemps.


Un bien beau disque, comportant onze compositions de Joe ainsi que "Running After Love" de Melanie Safka. Le disque est sous-titré "1985-2009" et cela illustre bien la façon de travailler de Joe Phillips. Je ne connais pas la version originale du disque, mais cette édition de 2009 est une véritable réussite.

Mais les amis de Joe en veulent plus (j'en fais partie) et ne cessent de lui réclamer de nouvelles rééditions. Ils ont enfin été (partiellement) entendus et, en ce mois de mars 2012, est apparu "Northern Towns", initialement publié au début des années 90, et grandement enrichi de titres bonus.


Et là je dis - et même j'écris - et je pèse mes mots: "attention, chef d'oeuvre"! "Northern Towns" est très différent de "Postcard", dique enregistré avec un petit groupe. Ici, Joe est pratiquement seul: un tambourin sur un titre, une basse sur un autre, un duo vocal sur un troisième. Le reste est 100% Joe Phillips, du moins pour l'interprétation car, pour la circonstance, Joe fait largement appel à d'autres songwriters, célèbres ou non: Tom Russell (le morceau titre est une de ses compositions que Tom n'a publiée que sur une obscure compilation), Bob Dylan Leonard Cohen, Neil Diamond, Elton John & Bernie Taupin, Bob McDill, Cormac McCarthy (not the writer), Barbara Keith et même Billie Holliday.

Au long des 17 plages, on découvre un interprète sensible, qui nous délivre un folk teinté de soul, profondémént original, qui se démarque sans difficulté des interprètes originaux.Écoutez par exemple ce qu'il fait sur "John Brown" de Bob Dylan. Plus qu'étonnant, captivant!

Les compositions originales ne sont pas en reste: "It Ain't Over", "China Wheel", "The Old Fishin' Hole" (en duo avec Alexander Delorenzo), "Survival" le prouvent. Et la version live de "Milltown Saturday Night", son morceau fétiche est absolument superbe.

Un petit mot sur la qualité sonore du CD qui démontre l'excellence de Joe Phillips quand il coiffe sa casquette d'ingénieur du son et de producteur. Le disque est simplement parfait, le son est chaud, c'est simplement l'ami Joe qui chante et joue à côté de vous, rien que pour vous. Un pur plaisir. À offrir, à s'offrir!

mardi 6 mars 2012

Bap Kennedy

La revanche du marin

J'ai découvert Bap Kennedy, songwriter irlandais, il y a peu de temps, un peu par hasard. Un son et une voix intéressants, des réminiscences de Bob Dylan, des accents d'Indio Saravanja, l'ami Argentino-Canadien.

Me plongeant dans sa biographie, j'ai découvert qu'il avait été leader du groupe Energy Orchard (rien qu'un nom pour moi à ce jour) et, surtout, que son premier album solo "Domestic Blues" (paru en 1998) avait été produit par The Twangtrust, c'est à dire Steve Earle et Ray Kennedy.


Je n'étais pas au bout de mes (bonnes) surprises puisque Steve Earle ne se contentait pas de produire, il jouait (et chantait) sur la plupart des morceaux comme ces autres géants américains que sont Peter Rowan et Jerry Douglas, mais aussi Nanci Griffith, Larry Atamanuik, Roy Huskey Jr. ou Nancy Blake. Tous les détails sur Wikipedia.

Une édition spéciale de cet album a été publiée au Royaume-Uni avec un visuel différent et deux titres bonus, sans oublier, en titre caché, une reprise un peu déjantée de "Dirty Old Town" d'Ewan MacColl par Bap Kennedy avec Steve Earle.



Pour son deuxième album solo, paru en 1999, Bap est retourné en Irlande, avec des musiciens locaux, mais est resté aux USA pour ce qui est de la musique dans la mesure où "Hillbilly Shakespeare" est entièrement consacré à des reprises de titres de Hank Williams.


Ce disque est une véritable réussite et une performance d'interprète.


Je saute quelques années, au cours desquelles Bap a publié quelques albums: "Lonely Street" (2000), "The Big Picture" (2005), "Howl On" (2009) pour arriver à l'hiver 2012 où l'artiste nous propose une oeuvre magnifique "The Sailor's Revenge".



Le disque, enregistré à Londres, est produit par Mark Knopfler et comporte onze titres, tous de la plume de Bap Kennedy qui confirme en beauté son statut de Dylan Irlandais.

Le casting est somptueux, jugez-en: Bap Kennedy (guitare acoustique et voix); Mark Knopfler (guitare acoustique, guitare électrique, harmonies); James Walbourne (guitare acoustique, guitare électrique, harmonies); Jerry Douglas (lap steel, Dobro); Guy Fletcher (orgue Hammond, ukulele, piano, harmonies); Michael McGoldrick (flute, cornemuse, sifflet); John McCusker (cittern, violon); Ian Thomas (batterie); Glenn Worf (basse électrique, contrebasse) avec la participation, sur un titre chacun de Richard Bennett (guitare électrique) et Brenda Kennedy (harmonies).

Une version "Limited Deluxe Edition" est paru avec un CD bonus comprenant onze titres qui retracent la carrière solo de Bap Kennedy.

Pour le plaisir des oreilles, une reprise de "Madame George" (illustrée par des images de Paris), chanson légendaire de Van Morrison, un autre illustre irlandais, avec qui Bap s'est parfois produit (notamment avec Energy Orchard) et avec qui il a écrit "Milky Way" que l'on retrouve sur le CD bonus de "The Sailor's Revenge"


samedi 25 février 2012

Mike Rimbaud, underground artist from Coney Island (2ème partie)

L'interview


Sam: Bonjour Mike. D'abord, qui es-tu? Tu te définis généralement comme un artiste underground. Qu'est-ce que cela signifie pour toi?
Mike: Underground siginifie ne pas être dans la tendance courante, cela veut dire que tu es en dehors du système, en marge. Je vis pour mon rock 'n' roll. Ma vie a eté celle d'un rock-poète et peintre underground, et rien de moins. Je vis ma vie comme un poème épique. Je ne me suis jamais trahi, je suis resté fidèle à ma vision originelle, je me bas pour survivre en marge, mais c'est la vie d'un vrai artiste, je suis à l'opposé d'une rock star riche et célèbre, je suis un artiste rock pauvre et inconnu. Je suis en dehors du système, j'ai été poussé là mais cela me rend plus fort et mieux placé pour observer le côté ridicule de notre système. Je n'ai pas fui, je n'ai pas abandonné, je continue à lutter. Je veux faire des chansons rock qui soient belles et puissantes. Je suis un rocker-songwriter poète-artiste qui fais de la musique seulement par passion de créer. Ma musique est la bande-son de ma vie et j'espère qu'elle peut inspirer les autres.

Sam: Tu es un chanteur-songwriter mais aussi un peintre de talent. Qu'est-ce qui est le plus important pour toi?
Mike: Les deux sont aussi importants pour moi, mais je suis d'abord un rocker.

Sam: Tu es New-Yorkais mais, vers 1990, tu as traversé l'océan pour vivre en France pendant quelques années. Pourquoi? Et pourquoi as-tu quitté la France?
Mike: Je voulais faire rocker la France comme Hendrix avait fait rocker le Royaume-Uni. J'ai en fait vécu à Paris pendant environ 2 ans et demi de 1991à 1993, c'est tout. J'ai fait quelques tournées en France après mon retour à New York, c'est peut-être pour cette raison que ça te paraît plus long. Quand je suis parti pour Paris, je pensais que c'était pour toujours, mais après une paire d'années, je manquais d'énergie et d'inspiration. Je venais aussi de subir une rupture difficile, alors j'ai rompu aussi avec Paris et je suis reparti pour New York City. C'est intéressant, quand j'ai quitté New York pour Paris en janvier1991, je venais aussi de terminer une relation avec une petite amie mais, en plus, je n'étais pas heureux que les USA s'engagent dans la guerre du Golfe. J'étais un expatrié à Paris comme Henry Miller avant moi, et fier de cela.

Sam: Tu as pris le pseudonyme de Rimbaud comme nom d'artiste. Pour quelle raison? Y a-t-il un rapport avec Thomas Miller qui est devenu Tom Verlaine?
Mike: J'avais juste 20ans, je pensais simplement que ça sonnait rock 'n' roll, c'esr tout, C'est très simple. J'aimais la façon dont le nom roulait sur la langue et j'aime toujours cela, c'est moi. Rien à voir avec Tom Verlaine, je ne le connaissais même pas à l'époque, il est d'une generation antérieure.

Sam: Tu as publié 3 albums sur des labels français: "Mutiny In The Subway" (1989), "Funeral" Lover" (1991), "Red Light" (1993). Ils ont eu un bon accueil en France. En a-t-il été de même dans ta terre natale?
Mike: Je suppose que les rares personnes qui les ont entendus les ont appréciés, mais je ne suis qu''un artiste underground ici, pas du tout connu. Je ne l'ai jamais été et ne le serai probablement jamais.

Sam: Elliott Murphy (qui est toujours une légende ici) a produit "Red Light". Comment l'as-tu rencontré? Le connaissais-tu avant, quand il vivait à New York?
Mike: Je l'avais seulement rencontré à l'occasion de quelques concerts à New York City et n'étais pas familier avec son travail à l'époque. Plus tard, nous avons fait quelques shows ensemble en France.


Sam: Après ton retour à NYC, tu n'as publié que 3 autres albums: "Graffiti Trees" (1997), "Beast Of Broadway" (2002) and "What Was I Thinking?" (2010). (il y a eu aussi un projet à part, "Dawn Town Project" avec CharlElie Couture). Étais-tu moins actif sur le front musical, ou était-ce une conséquence de la crise du disque?
Mike: Après “Graffiti Trees”, entre 1998 et 2002 j'ai enregistré pas mal de musique en collaboration avec mon ami Marc Billon, un compositeur de musique électronique de Paris. I quittais New York pour venir à Paris quelques fois par an, pendant une semaine ou deux, pour enregistrer dans son studio, j'apportais ma guitare et mes textes. Nous enregistrions dans un studio & New York aussi. Le projet était appelé “Adam Evening”. Nous avons enregiostrés environ 20 titres qui n'ont jamais été publiés. J'ai cherché une maison de disques, mais aucune n'a été intéressée, alors j'ai laissé tomber; c'est une honte, c'est différent de tout ce que j'ai fait. J'aimerais le publier un jour, mais j'ai peu de respect pour le business de la musique (qui n'a rien fait pour moi). Entre mon CD acoustique, “Beast of Broadway” qui a été écrit au Brésil et enregistré à New York en 2002, et “What Was I Thinking?” je me suis souvent produit dans les clubs de New York et j'ai écrit et enregistré pas mal de chansons. Je n'ai pas sorti de CD, parcque je n'étais pas sûr de la façon de le faire. Une grande partie de cette musique est devenue “What Was I Thinking?”.

Sam: 2010 a aussi vu la publication d'un coffret (une édition limitée à 1000 exemplaires – le mien est #0065), "An Underground Life in NYC" avec tous tes albums solo et quelques belles reproductions de tes peintures sur cartes postales? Était-ce important pour toi? Le coffret s'est-il bien vendu?
Mike: Pour les ventes, je ne sais pas, je n'en ai même pas vu de bilan récent, en fait, je n'en ai pas eu de retombées financières. "Bien vendre" n'est pas ma raison d'être. Je me concentre sur le fait de faire de la musique "importante", c'est tout. C'est le boulot du label de faire de la publivité et de vendre les CD, ce n'est pas le mien. Une grand compagnie peut même vendre des ordures si elle injecte assez d'argent, c'est pour ça qu'il y a tant de musique de merde un peu partout, il y a la force de l'argent derrière. Sans la publicité des majors, il est difficile d'être compétitif sur le marché. Ce n'est pas pour cela que je fais des disquess. Je suis heureux que quelqu'un soit intéressé par le coffret, bien sûr, mais ce n'était pas mon idée au départ.

Sam: Maintenant, un an plus tard, un nouvel album tité "Coney Island Wave" est publié uniquement en téléchargement. Je suppose qu'il y a des raisons financières à cela. Sera-il publié en disque "physique"?
Mike: Je n'ai pas l'intention de le sortir en CD, c'est plus simple pour l'artiste de le faire seulement en téléchargement aujourd'hui. Si une compagnie est prête à payer pour faire des CD, elle peut me contacter. Je veux simplement que ma voix soirt entendue, et mettre les MP3 en ligne est maintenant pour moi la meilleure façon de procéder.

Sam: Je sens que cet album est très important pour toi. Ai-je raison?
Mike: Oui, je sens très fortement que c'est un disque important et qu'il doit être écouté. C'est peut-être ce que les Stones ressentaient pour “Sticky Fingers” ou les Beatles pour “Sgt. Pepper's”. Je sais que que la musique a du pouvoir et peut générer des transformations.

Sam: Quand j'écoute ce nouvel album, j'entends un rocker qui écrit des folksongs. J'avais la même impression la première fois que j'ai écouté "Mutiny In The Subway" (même si, à lépoque, c'était en Avril 1990, je t'aurais sans doute qualifié de punk-rocker). Mais comment te vois-tu toi-même?
Mike: Je suis un punk rocker comme Joe Strummer pouvait l'être. Je suis politique et romantique, je crois à la révolution et à l'évolution et au rock 'n' roll.


Sam: Tu écris des chansons concises, avec des mélodies fortes et textes acérés. Tu chantes parfois comme un "jeune homme en colère" (allusion à "Angry Young Man" de Steve Earle). Tu refuses de te résigner. Mais, en dépit de la crise économique et sociale, la pire depuis des décennies, il y a de moins en moins de chanteurs protestataires ou traitant des thèmes d'actualité. Ou, du moins, on ne les entend pas. Comment expliques-tu ce fait?
Mike: Le contrôle corporatiste du business du disque, de la radio et de la télévision, ne veut pas que les gens entendent de la musique qui les fait réfléchir et entrer en action. Nous avons 2 guerres en cours, celle d'Afghanistan est la plus longue de l'histoire US et celle d'Irak est une erreur absolue. Il n'y a pourtant pas de musique protestatire du tout parmi ce qu'on entend couramment alors même que la plupart des Américains souhaitent la fin de ces guerres. Ce n'était pas la même chose pendant la guerre du Viet Nam dans les années 1960’s .

Sam: Dans quelques-unes de tes nouvelles chansons, tu parles de la situation en Amérique, du fossé toujours plus large entre les riches et les pauvres. As-tu envie d'en dire plus? (soit dit en passant, c'est la même chose en France)
Mike: C'est de pire en pire ici, les USA deviennent une république bananière avec les super riches et tous les autres qui luttent désepérément pour vivre au jour le jour, avec peu d'espoir de progresser. L'écart entre les riches et les pauvres est le plus large depuis la grande dépression des années 1930’s. À l'époque, Franklin Delano Roosevelt avait fait beaucoup pour aider l'économie avec des programmes créateurs d'emplois; de nos jours, le gouvernement ne fait à peu près rien et dans le déni quant à la gravité de la situation. Le gouvernment est corrompu par l'argnet des corporations, et les policticiens sont sous la coupe de ces corporations qui financent leurs campagnes. La majorité des mebre du Congrès est constituée de millionaires qui ne pourraient pas moins se soucier des familles de travailleurs et de leurs luttes. Les corporations (compagnies pétrolières, agences de communication, etc.) sont cosidérés comme des individus alors que les gens sont considérés comme des animaux nuisibles. Nous sommes devenus "The United Corporations of America".


Je me dresse pour la classe laborieuse et les pauvres. Il faut que nos voix soient entendues! Les rock stars multi-millionaires ne peuvent faire cela et ne le font pas.

… à suivre, peut-être…

PS: note for my English-only speaking friends, I'll post the original texts (in English) next week.

vendredi 24 février 2012

Mike Rimbaud, underground artist from Coney Island (1ère partie)

Préface

Mike Rimbaud (qui ne s'appelle pas plus Rimbaud que Tom Verlaine ne se nomme Verlaine) n'est pas un inconnu, surtout en France où il a vécu au début des années 1990, publiant 3 albums (le dernier produit par Elliott Murphy) avant que le mal du pays ne l'incite à regagner New York. Je vous en dirai un peu plus sur sa discographie mais en attendant, vous pouvez vous rendre sur son site.

Mike Rimbaud est un artiste underground et tient à cette appellation comme il l'explique dans l'interview qui sera prochainement publiée ici-même.

C'est un artiste, un vrai, un peintre, un poète, un rocker, qui a un haut niveau d'exigence envers lui-même comme envers les autres. C'est un rocker en colère, qui ne se reconnait pas dans l'évoulution de son Amérique. Comme Tom Pacheco, il refuse de ramper, de se plier à la dictature de la bien-pensance et du politquement correct. Un écorché vif qui se place aussi dans la lignée des topical singers folk qu'étaient par exemple Woody Guthrie ou Phil Ochs.

Le disque: CONEY ISLAND WAVE


Il y a plus de sept mois, Mike a produit cet album, disponible uniquement en téléchargement. J'avais recueilli dès cette époque ses commentaires sur chaque titre, ainsi qu'une interview destinée à être publiée. Xroads n'existant plus, j'ai proposé de donner les textes à deux magazines musicaux français qui ont une bonne diffusion. J'attends toujours les réponses à mes différents mails. Vous pouvez donc continuer à ne pas lire Rock & Folk et Rock First qui ne savent pas reconnaître la vraie valeur d'un artiste. La chanson "Got To Sell Yourself" peut leur être dédiée. Vous comprendrez pourquoi en lisant cet article.

Le disque (12 titres composés ou co-composés par Mike Rimbaud) a été enregistré en 2011 aux Cobble Stone Studios, à New York. Mike chante, joue toutes les parties de guitare, d'harmonica et de claviers. Il est accompagné par Kevin Tooley à la batterie, Andrea Pennisi aux percussions et Chris Fletcher à la basse.
C'est un disque brûlant, un brûlot en prise directe avec l'actualité qui dresse un constat lucide et sans concession de l'état de l'Amérique et du monde. Un disque plein de colère exprimé, mais pas sans espoir. Un album vers lequel je reviens régulièrement depuis ce jour de juillet où je l'ai découvert.

Voici la présentation de chacun des titres par Mike Rimbaud lui-même.

Don't You Love This City
Cette chanson parle de la difficulté de survivre, de vivre à New York aujourd'hui sous le règne d'un maire richissime, Michael Bloomberg. Tout devient trop cher, de véritables barons de l'immobilier poussent les pauvres et les classes laborieuses hors de la ville. Manhattan devient un grand hôtel pour riches.

Saving Up To Go Bankrupt
L'économie, aujourd'hui aux États unis, est dans sa pire situation depuis la Grande Dépression des années 30. Le taux de chômage est très élevé. Il n'y a d'espoir que pour les riches et le rêve américain n'existe plus que pendant le sommeil. Kevin Tooley est fantastique ici à la batterie. Il avait joué sur mon quatrième CD, "Graffitti Trees".



Unicorn
C'est une chanson sur la passion et l'amour, avec des références à la légende médiévale de la licorne.

Everyone Needs a Daddy
Je suis un père célibataire, divorcé avec 3 enfants. Comme l'indique le titre, je pense que chacun a besoin d'un papa.

Tears For The Rich and Famous
Il est ici question de l'injustice dans la société avec l'inégalité croissante entre les riches et les pauvres. C'est une société américaine ou seuls les riches ont les opportunités et le succès pendant que les pauvres souffrent et envoient leurs enfants à la guerre, seul job possible parce que l'éducation est trop chère. Les USA devraient être attentifs à ce qui s'est passé en Egypte car, si nous continuons dans cette direction, il y aura un jour une révolution ici aussi.

Dance With A Mermaid
L'action de cette chanson se situe sous la mer dans le royaume de Neptune. Beaucoup d'images comme la danse sur le Titanic ou les marées noires et la pollution. J'ai ajouté l'effet sonore du sonar d'un sous-marin et ainsi, lorsque vous écoutez la chanson, vous avez l'impression de voir l'action depuis un sous-marin.

Mama, Say Something Nice
Pendant qu'un homme fait la lessive, il pense à une histoire d'amour qui s'est mal terminée. Une chanson introspective et émouvante. J'aime vraiment la façon dont mes guitares interagissent ici.

Puppet Man
Les politiciens américains sont devenus les marionettes des grandes entreprises US. Ce n'est pas la volonté du peuple qui contrôle notre gouvernement mais l'argent des corporations.

Burning the Night Out Early
Tard, la nuit, un homme emmène une fille qu'il vient de rencontrer pour une balade sur une plage de Coney Island. Un décor romantique, une scène de séduction. Le titre est principalement instrumental, une jam avec le percussionniste Andrea Pennisi, compagnon des premières heures qui jouait déjà sur mon premier album, "Mutiny In The Subway".


Got to Sell Yourself
Ce titre évoque le fait de se vendre aujourd'hui en Amérique; chacun est encouragé à se prostituer en quelque sorte dans notre socié supercapitaliste. Il n'y a ni intégrité ni âme avec cette mentalité. Une personne est évaluée en fonction de ce qu'elle gagne et non de sa qualité. Ce qui est considéré comme "bon" est uniquement ce qui se vend. Si quelque chose, ne se vend pas pas, ce n'est pas bon. Alors il faut travailler encore plus durement à se vendre soi-même.

Put Your Facebook on The Shelf
Sans doute la chanson la plus poétique du CD. Un chanson de colère sur l'exploitation, les amis de Facebook, le manque d'intimité et la volonté des gens de rendre publics sur internet des aspects personnels et privés de leurs vies, ce qui est potentiellement dangereux.

Here Comes The Subway Sun
Une chanson optimiste depuis le métro, le souterrain. Il y a des références à la chute du World Trade Center et à la grande période noire de 2003. Avec un rythme rockabilly et de véritables bruits du métro ajoutés au mixage. C'est comme si on chevauchait le métro dans ce morceau. J'ai voulu en faire une chanson d'espérance, à la manière de "Here Comes The Sun" de George Harrison.

À vous de juger, maintenant...

Postface

Mike Rimbaud ne fait pas que chanter ses propres compositions, il lui arrive aussi de reprendre celles des autres. C'est ainsi que, récemment, il nous a proposé sur internet sa version de "Baby You're A Rich Man".

Quelques semaines avant, il avait publié "Can't Judge A Song By It's Cover". 8 reprises, rien que du lourd: Rolling Stones, Beatles, Bob Dylan, Phil Ochs, Antônio Carlos Jobim, Paul Desmond, Bruce Springsteen, Bob Marley! Pas mal, non?


Prochainement, l'interview...

lundi 13 février 2012

Un peu de pub

Possessed by Paul James à Reims

Concert Harold Martinez / Thee Verduns / Possessed by Paul James

« Possessed by Paul James chante les chansons les plus poignantes et inflammables du moment. » Stéphane Deschamps, Les Inrockuptibles. Juillet 2011. N°817

Hillgrass Bluebilly France présente en concert à Reims, le Mardi 21 Février 2012. L'appart café, 9 avenue de Laon, 51100 Reims. Entrée gratuite !

Harold Martinez (Folk/Blues) viendra défendre son prochain album « Bridmum », qui sortira le 6 Avril 2012. « ...un aperçu saisissant et très original : mélange de country plaintive, folk déjanté et blues obsessionnel...une réussite frappadingue portée par une voix habitée et une scansion incantatoire... »

Thee Verduns : Duo alt Country/ Blues foutraque.
Nos talentueux et sympathiques amis Metzois nous feront le plaisir de leur présence. Ils ont joué au Deep Blues Festival de Minneapolis, et Nicolas est également dessinateur (il a écrit une B.D narrant son voyage aux U.S.A et sa rencontre avec notre 3 ème homme du soir).

En Vedette Américaine : Possessed by Paul James
En pleine tournée des Nuits de l' Alligator, Possessed by Paul James a.k.a Konrad Wert sera là pour finir de mettre le feu dans la capitale mondiale du champagne, dans le chaudron de l'appart café.

Un concert 3 étoiles.

Le label Normandeep Blues Records sort un EP 6 titres de Possessed by Paul James « Live at Antone's », en édition limitée, qui sera disponible pendant les concerts de Possessed by Paul James lors du festival « Les Nuits de l' Alligator », ainsi que sur le site du distributeur http://www.nayatidreams.fr/

Prochaines sorties
« There Will be Nights when I'm lonely » Hillgrass Bluebilly Records. - Printemps 2012

Hillgrass Bluebilly France est la franchise hexagonale du tourneur/promoteur et label Hillgrass Bluebilly. Notre but est de contribuer à développer la scène Roots en France, en organisant des concert et en faisant la promotion d'artistes tels que Possessed by Paul James en Europe. Pour plus d'informations : Facebook.com/HillgrassBluebillyFrance.
E-mail : hillgrassbluebillyfrance@gmail.com

Contacts : Nicolas Miliani
hillgrassbluebillyfrance@gmail.com - - 06 75 73 78 38

vendredi 3 février 2012

Ceux-là sont pour nous

Tout beau, tout chaud

Il faudra être fort pour entrer dans mon top 10 de l'année 2012. Deux albums, parus en janvier, sont déjà assurés d'y figurer. Ils seront chroniqués dans "Le Cri du Coyote" #127 auquel je vous invite à vous reporter dès sa parution.


Le premier est un album hommage à Guy Clark, l'un des plus grands songwriters vivants (et l'un de mes favoris avecJohn Prine - ici présent dans un superbe duo avec Emmylou Harris).


http://www.guyclark.com/news.php

Pour des détails sur les titres repris (oui, il en manque sur ce double CD qui aurait pu être quadruple) et les artistes présents, il suffit de suivre le lien ci-dessus.


Le second est la nouvelle publication de Gretchen Peters, "Hello Cruel World", un disque d'une beauté sombre et prenante. À ne pas écouter d'une oreille distraite!


http://www.gretchenpeters.com/

Là encore, une visite sur le site s'impose. Vous y découvrirez notamment les textes et les notes se rapportant à chacun des titres de l'album.


Mais ce n'est pas tout, il y a aussi le nouvel album de la pétillante Anaïs Mitchell, "Young Man In America" qui vous surprendra et vous ravira.


Et Anaïs en a profité pour donner un lifting à son site web et c'est ici: http://anaismitchell.com/


Je n'oublierai pas Tom Pacheco, l'un des artistes les plus passionnants et les plus intègres de la scène américaine depuis plus de 40 ans. Son nouvel opus, "Luminol - The Houston Sessions", paru à l'automne 2011 ne fait pas exception à la règle.


À acheter, comme le reste de la discographie de Tom, sur son site: http://www.tompacheco.com/


Voici un aperçu de mes coups de coeur de ces dernières semaines, et la liste est loin d'être exhaustive...

jeudi 5 janvier 2012

Richard Gilly

Quatre disques jamais édités en CD


RICHARD GILLY (1971)


 1- Je ne suis pas un grand fermier (Richard Gilly)
 2- Le migrateur (Richard Gilly)
 3- Le voulez-vous (Richard Gilly)
 4- Meredith (Richard Gilly)
 5- Une nuit passée au nord de San Francisco (Richard Gilly)
 6- Mon navire blanc, ma goëlette (Richard Gilly)
 7- De l'amour (Richard Gilly)
 8- A mon père (Richard Gilly)
 9- La fille qui couche avec le vent (Richard Gilly)
10- Le naufragé (Richard Gilly)
11- La belle et son ombrelle (Richard Gilly)
12- De l'amour (reprise) (Richard Gilly)


LES FROIDES SAISONS... (1975)


 1- Les froides saisons (Richard Gilly)
 2- Ma Lady de Montargis (Richard Gilly)
 3- Eloïse (Richard Gilly)
 4- Les wagons bleus (Richard Gilly)
 5- Loi du 28 Mars 1882 (Richard Gilly)
 6- Maman lapin (Richard Gilly)
 7- L'appelé (Richard Gilly)
 8- La fille au rouge un peu sanguin (Richard Gilly)
 9- Donnez-moi un peu (Richard Gilly)
10- Une histoire de solitude (Richard Gilly)
11- Souviens-toi (Richard Gilly)
12- Quand tu partiras vers (Richard Gilly)


RICHARD GILLY (1977)


 1- Portrait de famille (Richard Gilly)
 2- Va lui dire que c'est une conne (Richard Gilly)
 3- Titanic (Richard Gilly)
 4- L'amour tranquille (Richard Gilly)
 5- Sang mêlé (Richard Gilly)
 6- Photographe (Richard Gilly)
 7- Enfant blue (Richard Gilly)
 8- Miss Bakelite (Richard Gilly)
 9- Garçon (Richard Gilly)
10- Les larmes du coeur (Richard Gilly)
11- Le militaire anglais (Richard Gilly)


RICHARD GILLY (1984)


 1- Râleur (Richard Gilly)
 2- Living (Richard Gilly)
 3- Blonde (Richard Gilly)
 4- Le coeur en laisse (Richard Gilly)
 5- Has been (Richard Gilly)
 6- Message pour mon fils (Richard Gilly)
 7- J'veux qu'tu restes (Richard Gilly)
 8- Navy détresse (Richard Gilly)
 9- Factice (Richard Gilly)
10- Douce Asiate (Richard Gilly)
 
 
 Et 2 CD "Collectors'


RÊVES D'ÉLÉPHANT (1993)


 1- Les poissons roses (Richard Gilly)
 2- Rousse de secours (Richard Gilly)
 3- Perdu en mère (Richard Gilly)
 4- Rêves d'éléphant (Richard Gilly)
 5- Made in Spain (Richard Gilly)
 6- J'oublie (Richard Gilly)
 7- Attends (Richard Gilly)
 8- Pakemkit (Richard Gilly)
 9- I love Paris (Richard Gilly)
10- Cap'tain (Richard Gilly)
11- Le dos de l'ange (Richard Gilly)
 
 
DES ANNÉES D'ORDINAIRE (2002)
 
 
1- Nouveau monde (Richard Gilly)
2- Autour de toi (Richard Gilly)
3- Dieu reconnaîtra Lucien (Richard Gilly)
4- Va Lui dire que c'est une conne (Richard Gilly)
5- Spanish (Richard Gilly)
6- Zuydcoote côte (Richard Gilly)
7- Lambda inconnu (Richard Gilly)
8- Blonde (Richard Gilly)
9- La vie au grand air (Richard Gilly)

mercredi 28 décembre 2011

Le Cri du Coyote #126

Il est paru pour Noël !!!



Le Cri du Coyote va célébrer son quart de siècle d'existence en janvier 2012. Pas mal pour ce fanzine qui ne s'est jamais pris pour un grand et qui, sous la direction de Jacques Brémond, entend bien poursuivre encore longtemps, sans vendre son âme, avec, pour avancer, un seul carburant, la passion.

Ce numéro 126 marque pour moi le début d'une collaboration que j'espère longue et enrichissante. Quatre petites chroniques, après une présentation, dans le numéro précédent, de "Hymns From Home", le sampler du label Hemifrån de l'ami Peter Holmstedt.

Les nominés de ce mois-ci sont, par ordre d'apparition dans la rubrique "Disqu'Airs":


Eric Taylor "Live At The Red Shack" (Cri du Cœur)



Boca Chica "Get Out Of Sin City"



John Prine "The Singing Mailman Delivers"



Brian Ledford & Cadillac Desert "From Sunlight Into Shadow"



Et bien sûr, toutes les rubriques habituelles sont présentes, du rock 'n' roll au bluegrass, du blues au zydeco, de la country du Texas à celle de l'Australie... À signaler en particulier un dossier de Jacques Brémond sur Amber Digby et un de Bernard Boyat sur Jack Scott. Deux belles découvertes pour moi!

J'en vois qui sont déjà prêts à se ruer vers les kiosques. Calmez-vous, "Le Cri" n'est disponible que sur abonnement, et c'est ici:

Le Cri du Coyote
BP 48
26170 BUIS LES BARONNIES
France
cricoyote@orange.fr
L'adhésion est de 27,00 € pour la France, 30,00 € pour l'étranger et 32,00 € pour les bienfaiteurs (à ce tarif, pourquoi s'en priver).