jeudi 30 novembre 2023

Disqu'Airs, par Éric Allart et Jean-Christophe Pagnucco

 

The Country Side of HARMONICA SAM

"Back To The Blue Side" (2023. Sleazy records)

Samuel Andersson poursuit sans surprise sa recréation du Nashville sound précoce avec ces 14 titres dans la continuité de l’œuvre déjà entamée. C’est le son Starday tel qu’on pouvait le caractériser entre 1960 et 1965. Les arrangements sont toujours tirés au cordeau, faisant la part belle à la pedal steel de Peter Andersson parfois rehaussée d’un fiddle ou d’un piano. L’ensemble est impressionnant de mise en place et de cohérence. Le tout est soutenu par un shuffle solide. On est en terrain connu, trop peut-être et c’est là que l’exercice touche ses limites. Est-ce dû à l’âge? Aux quarante ans de consommation intensive de cette esthétique? Toujours est-il que l’album très agréable ne suscite ni passion ni surprise en ce qui me concerne. Pourtant des efforts sont faits pour sortir de l’impression de monotonie de l’ensemble. Citons Tell Her signée par l’excellent Theo Lawrence qui a rencontré ici des frères spirituels avec une mélodie immédiatement reconnaissable. J’ai aussi beaucoup apprécié Take A Letter Miss Gray où l’on se vautre avec délice dans les affres de la cheatin’ song. Once Upon A Time, avec une intro en guitare acoustique, évoque Don Gibson ou le parfait LP sous estimé de Jim Ed Brown, Bottle Bottle. Il sera intéressant de suivre l’évolution du groupe: coller à son style et son esthétique pour un public fidélisé qui a découvert le konky-tonk 60 avec Harmonica Sam ou entamer des incursions hors des sentiers balisés dans les dérives variétisantes de la pop country du début des années 70 Peu importe, l’œuvre reste impressionnante dans sa globalité, presque unique dans sa niche, et mérite gratitude et reconnaissance. (Éric Allart)

 

YODELIN’KIK and RATTLESNAKE JOE

"American roots music II" 

Le bluegrass français connait depuis une poignée d’années l’émergence d’une nouvelle génération d’artistes que les amateurs ont pu apprécier au festival de la Roche sur Foron. Si le vivier de leurs aînés brillait par un tropisme pour les instrumentaux progressistes, dans le cas présent nous découvrons un duo inscrit dans la tradition revendiquée du brother’s duet. Egalement impliqués dans le collectif Pig Society, Valentin Lallart et Antoine Gellée nous interprètent avec conviction des standards des années 20-30, avec deux instrumentaux guitare-mandoline. On est tenté de comparer le résultat aux regrettés Old Time Hayride dans le même format, avec la figure tutélaire des Monroe Brothers comme influence majeure revendiquée. C’est fin, léger, avec toute la fraicheur naïve d’un style désormais centenaire. Les closes harmonies fonctionnent bien et, pour avoir vu le duo se produire cet été 2023 au Festival Herbe Bleue en Anjou, on peut peut-être regretter que l’album autoproduit soit passé inaperçu dans le milieu. Le charme vient de la subtilité du jeu et du chant: pas de démonstration virtuose afin de réinventer l’eau tiède, mais des nuances et un buzz plus que crédible dans les harmonies vocales. Les deux gars ne singent pas avec excès l’accent appalachien pre-war et le résultat tend à évoquer la fragilité émotionnelle des Blue Sky Boys. Voici une carte de visite qui saura tenir sans rougir son rang au sein de toute collection sérieuse à coté de ses parents étrangers. (Éric Allart)

 

Charlie WATTS

"Anthology", BMG 2023

A l’heure où les médias ruissellent du buzz colossal créé par la sortie de  Hackney Diamonds, le tout dernier album en date des Rolling Stones (best rock’n’roll band ever since 1964), c’est, une fois n’est pas coutume, leur légendaire et unique batteur, décédé en 2021 après presque 60 ans de loyaux services, qui a les honneur, ces jours-ci, d’une copieuse et luxueuse anthologie éditée par BMG, regroupant le meilleur de son œuvre solo (si, si, elle existe), œuvre au cours de laquelle, au gré de parutions irrégulières et de concerts ponctuels dans des lieux choisis et avec des comparses tout aussi sélectionnés (quartet, quintet, tentet et orchestra), il s’est adonné avec un réel bonheur à sa passion profonde (et presque secrète), pour le jazz et le boogie-woogie. Autant le dire tout de go: la trentaine de titres qui s’égrènent au gré de la tracklist impeccable de ce double CD qui coule tout seul est absolument excellente, old time et hautement délectable. La finesse du jeu de Charlie Watts est éblouissante, large-ment à la hauteur de son drumbeat imparable qui a fait trembler les clubs et les stades. Quant au choix du répertoire, largement composé de standards jamais éculés et exécutés avec passion (Take The A Train, Perdido, You Go To My Head, Flying Home, Stompin’ At The Savoy, somptueux), il est hautement révélateur du jazz qui a pris le cœur du batteur aux cheveux blancs il y a quelques décennies sans jamais le rendre. Au-delà de la célébration du groupe dont il a été le cœur battant et vénéré (Charlie, Charlie…), ce bel opus constitue un cadeau précieux pour se souvenir de ce bel esthète que fut le grand Charlie Watts. (Jean-Christophe Pagnucco)

 

Denis AGENET & NOLAPSTERS

"Peace Of Land", Rock’n’Hall 2023.

Il est particulièrement plaisant et stimulant de constater que des figures familières de la sémillante scène blues française, dont les poids lourds s’illustrent si bien sur les scènes européennes, voire sur les scènes américaines, révèlent encore des talents cachés, après une bonne quinzaine d’année d’activité frénétique. Connu en tant que sideman, batteur émérite du groupe Bad Mules qui s’est tant illustré ces quinze dernières années, Denis Agenet, véritable référence du drumming blues en France, s’illustre désormais en tant que frontman, sans délaisser son instrument de prédilection. Originellement inspiré par Nola Records et soucieux de défendre les pépites des années 40 à 60 avec son groupe les Nolpasters, Denis Agenet propose en 2023 cet album copieux, dont toutes les chansons sont issues de sa plume. Qualité à souligner, loin des poses et des reproductions serviles de standards éculés, l’artiste a visiblement à cœur de défendre un répertoire personnel, et il est en pleine capacité de le proposer, ce qui est une qualité à souligner et largement apte à le démarquer d’une concurrence, il faut le dire, bien peu créative. Entourés par le bottin des pointures du blues frenchy (Thomas Aubé aux guitares, le merveilleux Igor Pichon à la contrebasse, Cédric Le Goff aux orgues, Ben Bridgen au piano, ainsi que des guests aussi prestigieux que Nico Wayne Toussaint (le patron du blues européen), Arnaud Fradin, ou encore Gordon Beadle, Denis Agenet déroule un répertoire impeccable, bluesy en diable, swinguant sans cesse, soul au creux du cœur et groovy à la sauce New Orleans. Il s’avère, en plus d’être un batteur génial, être un chanteur impliqué et convaincant, ce qui est indispensable pour défendre des titres aussi personnels que Hey Dad (ma préférée) avec son picking entêtant et son harmonica délicat (l’album est dédié à ses parents), She’s My Fire Girl, qu’on dirait directement échappée de Specialty Records avec son piano entêtant et ses chœurs, Winky Meli, convoquant les fantômes de Fats Domino et de Dave Bartholomew, EarthBound, qui n’est pas sans évoquer les dernières aventures de William Bell produit par John Leventhal ou encore l’acoustique et envoûtant The Beautiful Sad Song. Une franche réussite. (Jean-Christophe Pagnucco)

 

Billy VALENTINE

"Billy VALENTINE and The UNIVERSAL TRUTH", Acid Jazz / Flying Dutchman, 2023.

Attention! Monument Soul Jazz en approche! Il serait si simple, pour des oreilles francophones recevant ce bel opus, la forme l’emporte sur le fond. La forme, il est vrai, à de quoi séduire et même impressionner. Voici un tout nouvel album de Billy Valentine, vétéran de la soul, qui a composé pour Ray Charles et les Neville Brothers, qui a collaboré avec Burt Bacharach et qui, après près de 50 ans de carrière, propose, dans un superbe écrin, un bel album de 8 titres puissants, où sa voix évoquant Terry Calier ou Curtis Mayfield, convoque les fantômes de Gill Scott-Heron et de Marvin Gaye. La couleur acid soul ou groovy jazz, admirablement servie par l’interprétation impeccable d’un artiste bien trop discret qui pourrait se hisser à la hauteur de quelques géants de la soul modern, rappelle les plus belles heures seventies de Tamla Motown ou de Stax, et rien que cela suffirait à convaincre. Mais il y a également le fond, et il serait bien dommage que les non-anglophones ignorent le fait que notre artiste a bien des choses à dire. Comme l’écrivait Roda-Gill, "à quoi sert une chanson si elle est désarmée"? Billy Valentine l’a bien compris, et ce sont les fantômes de l’Amérique profonde, en panne définitive d’intégration et de justice sociale, qui se trouvent dépeints dans cet opus qui, à bien des égards, pourrait constituer le What’s Goin' On des années 2020. Pour ce faire, il s’approprie, avec un talent colossal il faut bien le dire, les mots de Curtis Mayfield (We The People Who Are Darker Than Blue), de Stevie Wonder (You Haven’t Done Nothing), de Prince (Sign Of The Times, version sensationnelle ), et réinvente le puissant traditionnel Wade In The Water. Un très grand album de soul, à recommander à tous ceux qui ont des oreilles et un cœur. (Jean-Christophe Pagnucco)

 

Kaz HAWKINS

"Until We Meet Again", DixieFrog 2023.

Quelle grande chanteuse! Quelle belle artiste! Kaz Hawkins, soul et blueswoman irlandaise avalant et dévalant avec gourmandise les scènes françaises et européennes depuis quelques années, n’en finit pas de ravir sa base de fans qui ne fait que s’élargir, compte tenu de l’extrême qualité de ses prestations, de ses compositions et de ses productions. Son septième opus, Until We Meet Again, ne fait pas exception à la règle, et attrape l’auditeur à la gorge et aux tripes dès le démarrage a cappella du premier titre, Pray To, pour ne plus jamais le lâcher, du groovy en diable Get Up and Go, au bouleversant et élégiaque titre acoustique The River That Sings, que n’aurait pas renié John Hiatt, à Hold On for Home, qu’on dirait échappé d’un album sixties de Sam and Dave, en passant par le plus moderne Lonely Boy, presque californien, le déchirant Standing Tall, l’impérieux I gotta Be Me ou le dansant Get the Jack From The Bottle. Kaz Hawkins est dans la place, et ne cède pas un pouce de terrain lorsqu’il s’agit de conquérir le cœur des amateurs de blues, de soul, de rock racé, dont elle constitue l’une des plus brillantes interprètes et créatrices actuelles. Chapeau bas, au passage, à sa french team, absolument éblouissante, constituée de Stef Paglia à la guitare, de Cédric Le Goff aux claviers, du sensationnel Julien Boisseau à la basse, du légendaire Amaury Blanchard à la batterie, ainsi que Benoît Gaudiche à la trompette et Guillaume Sené au saxophone. Vite, un concert! (Jean-Christophe Pagnucco)

samedi 4 novembre 2023

Lone Riders, par Éric Supparo

 

Vous en voulez, des bonnes nouvelles ? Vous êtes en manque ? Alors éteignez-moi ça (internet news, k-tastrof TV, et tout ce qui n’est pas un ensemble hi-fi ou lo-fi, un casque, un autoradio ou une enceinte à deux balles) et posez-vous une minute. Disons cinq. Inspirez, expirez, par le diaphragme bien sûr. Vous y êtes? On peut avancer maintenant, merci de votre attention… 

 

The HANDSOME FAMILY

"Hollow" 

Seule la musique peut soigner nos âmes sous-alimentées. Et pas n’importe quelle musique, entendons-nous bien. Celle de The Handsome Family par exemple. Rencontrés pour le Cri en 2000, lors de la sortie de In The Air, Rennie et Brett Sparks n’ont fait que poursuivre leur chemin sans jamais (jamais) se détourner de leur credo, que l’on peut qualifier de country gothique mais qui est bien plus que cela. Je tiens (et je ne suis pas le seul - demandez un peu à Andrew Bird) Rennie Sparks pour un des plus grands songwriters vivants. Rien que ça. Et chaque album (le précédent, Unseen, datait de 2016) ne fait que confirmer : savoir écrire une chanson c’est choisir ses mots avec la précision d’un entomologiste. Les ordonner sans le moindre faux-pas. Rennie sait manier le sordide et l’humour, la poésie et les comptines cruelles, l’évocation et la description, les cauchemars récurrents et les visions terrifiantes, vapeurs toxiques émanant de nos jardins, nos sous-sols, nos cuisines ou nos cimetières… Brett ajoute sa patte unique pour la musique (sa voix profonde, instrumentations légères ou très orchestrées, crincrins acoustiques, grands pianos gavés de pathos… rien n’est exclu par défaut), et vous obtenez Hollow, un album qui est sans doute à classer dans leur top five. Envoûtant, presque sous hypnose, en tout cas ailleurs. Je ne me lasse pas de Two Black Shoes, The Oldest Water (aux couleurs très country, tout comme Invisible Man), Shady Lake et Strawberry Moon. Splendide album, en voilà une vraie bonne nouvelle! 

 

WILCO

"Cousin" 

Nous avions laissé Wilco en territoire country (Cruel Country) l’an dernier. Cousin, sorti cet automne, se veut délibérément plus aventureux, plus délicat d’accès. Jeff Tweedy et son band ont acquis, en tout bien tout honneur, un statut assez unique, grand groupe de scène, à la fois excitant et toujours calé, droits dans leurs boots. Qu’ont-ils donc de nouveau à nous dire ? C’est un peu le problème… Ils ont fait beaucoup, par le passé, sur Yankee Hotel Foxtrot, sur The Whole Love entre autres, pour mélanger leur cocktail alternative-indie-folk avec des éléments nettement plus modernes (le bruit, les dissonances, les expériences jazz de leur guitariste Nels Cline), avec des résultats souvent épatants. Si les textes de Jeff sont toujours irréprochables (Ten Dead), et sa voix reste sans le moindre doute émouvante, l’habillage musical est un peu décevant. Est-ce la production de Cate Le Bon? Un album par an, est-ce trop ? Je n’ai pas la réponse. Même si Cousin est d’un niveau qui dépasse largement la moyenne du moment, on aimerait aimer ça plus fort. À réécouter dans cinq ans, dix ans ? Pourquoi pas… 

 

Delaney DAVIDSON

"Wandering Heart" 

On remercie chaleureusement Delaney Davidson pour avoir compilé sur Wandering Heart une quinzaine de ses morceaux, piqués ici et là (surtout là), seul ou en compagnie de Tami Neilson (Whiskey and Kisses qui clôturait l’album Dynamite! de Tami en 2015) et Marlon Williams (fabuleux chanteur, Heaven For You est là pour en attester…). Le travail demande en effet d’avoir suivi le parcours en zigzag du bonhomme : folk dru, valses empoisonnées, blues primal et country malade (Still Her Heart), tout lui va. Il semble que Delaney ne quitte plus beaucoup son jardin de Nouvelle-Zélande, mais ses prestations scéniques, à mi-chemin du théâtre improvisé et d’un tour de chant rempli de fuzz et réverbérations en tous genres mériteraient presque un billet d’avion ! Pas le budget ? No problem, jetez-vous sur Wandering Heart, prix de consolation idéal!

 

Various Artists

"The Jeffrey Lee Pierce Sessions Project – The Task Has Overwhelmed Us" 

L’ombre de Jeffrey Lee Pierce, singer-songwriter de The Gun Club, n’en finit pas de nous hanter. Il faut dire que l’arrivée de cette personnalité au début des années 80 avait un goût inédit, mêlant punk et racines country-blues hurlantes. Son influence, avouée ou pas, est considérable sur ce qui a suivi, aux USA (le mouvement cow-punk par exemple) et en Europe (Noir Désir…). The Jeffrey Lee Pierce Sessions Project – The Task Has Overwhelmed Us n’est certes pas le premier hommage collectif et sans doute pas le dernier, mais il est assez réussi. On notera les noms de Nick Cave, Warren Ellis (Bad Seeds), Duke Garwood, Debbie Harry, Alejandro Escovedo (qui reprend fréquemment Sex Beat sur scène), Jim Jarmusch ou Hugo Race. Rien de comparable avec le sauvage abandon de Jeffrey, mais de très beaux moments, bruyants comme il faut (From Death To Texas signé Escovedo, excellent) ou profonds (Lucky Jim, délicat duo Chris Eckman & Chantal Acda). L’essentiel étant de ne pas oublier son talent d’écriture, et lui garder la place qu’il mérite dans l’histoire de la musique. 

 

VOXANNA

"Voxanna" 

Terminons avec Voxanna, combo acoustique basé dans le Michigan. Billy Brandt (voix et guitares), figure de la scène de Detroit (avec The Sugarees, AshCanVanGogh ou Grievous Angel) partage l’écriture (et le micro) avec Raquel Salaysay (basse) et Elaine Schoendorf (guitare tenor) sur douze titres qui font la part belle aux harmonies vocales (impeccables) et aux mélodies sans additif. Time Stand Still ouvre le bal avec des sonorités à la J.J. Cale, élégance et groove compris. On navigue avec grand bonheur entre influences folk-rock early-mid-70’s (les performances d’Elaine et Billy combinées viennent nous rappeler que ces années là étaient - sur ce créneau - très productives et sans doute inégalées), de CSNY à Lindsey Buckingham et Stevie Nicks. L’habillage léger (Kerry Gluckman, très efficace au cajon et autres percussions), mais jamais plat (incursion en territoire jazz-swing sur I Like Coffee, cuivres et rythme latino sur Half Past Cinco, les percussions finales de Cold World), permet aux compositions de respirer, de prendre leur envol sans forcer, et on se retrouve, dernier morceau fini, avec un large sourire aux lèvres, prêts à appuyer sur play une nouvelle fois. Après tout, la vie est belle, non? 

 

mercredi 1 novembre 2023

Avenue Country, par Jacques Dufour

 


 

"Coyote" 

Cet album titré Coyote est-il coyotesque? Oui car chacun pourra y picorer un titre ou deux (comme moi), voire plus si vous êtes ouverts autant à l’americana qu’à la country pure. J’ai pourtant apprécié sur les trois ou quatre premiers titres de cet album un violon aérien qui soutient parfaitement le vocal plutôt folk de cette chanteuse. Ma préférence ira en faveur d’un rock qui détonne agréablement sur un ensemble plutôt paisible. 

 

Colter WALL

"Little Songs" 

Cet album vous transporte dans les montagnes du Saskatchewan d’où est originaire ce chanteur. Ces chansons paisibles sont à écouter de préférence au coin du feu ou au bivouac car elles ont une connotation "cowboys songs". Principalement acoustiques elles se démarquent du style purement folk et guitare acoustique car elles se rapprochent davantage de la country avec l’apport du fiddle, de l’harmonica ou de la pedal steel guitare. Il y en a même une qui est littéralement calquée sur un "blue yodel" à la Jimmie Rodgers. Pour une soirée tranquille après la rando. 

 

Jon BYRD

"All Your Mistakes" 

Ce ne sera pas le disque de l’année. Ce nouveau venu est doté d’un vocal quelque peu nasillard qui manque de relief. Il me rappelle Jimmie Dale Gilmore mais avec un répertoire country/folk moins convainquant. Ses reprises de Woman Sensuous Woman (Don Gibson) et Four Strong Winds (Ian Tyson) sont loin de valoir les versions originales. Le meilleur titre est plus instrumental (pedal steel guitare) que chanté: il s’agit du classique A Fool Such As I (Hank Snow).

 

Eileen ROSE & The HOLY WRECK

"Luna Turista" 

Eileen Rose est une chanteuse à la personnalité bien marquée qui ne s’attache pas à rester fidèle à un style de musique bien défini. Tour à tour chanteuse pop, rock ou americana elle peut aussi tâter avec réussite la country comme le prouve le cashien Trouble From Tomorrow, Why Am I Awake où la seule reprise puisée chez Jennings, Luckenbach Texas. Pour le reste les balades acoustiques de plus de six minutes ne sont pas ce qui me convient, ni les titres pop/rock. Si vous êtes réceptifs aux multiples aspects de l’americana, Eileen Rose devrait vous plaire. 

 

Merle HAGGARD

"Opryland Nashville 1982" 

Si Hank Williams peut être considéré comme le véritable créateur de la musique country tendance honky tonk et certainement le plus grand compositeur de classiques du genre, Merle Haggard est la référence suprême pour tout chanteur country quelle que soit la génération. Trente-huit n°1 répartis sur une période de vingt-et-un ans (1966 à 1987) et cent-quatre chansons classées au Billboard. Il a fallu en choisir vingt-quatre et forcément il y aura des manques. La plupart des classiques sont là: Oakie From Muskogee, Working Man Blues, Mama Tried, Today I Started Loving You Again... Cependant il aura fallu en écarter d’autres: Bottle Let Me Down, Sing Me Back Home... pour laisser la place à des chansons moins connues ou à des reprises de standards de Bob Wills ou Jimmie Rodgers. Merle reprend sur scène ses succès récents: Big City, My Favourite Memory, Leonard... Il n’avait pas encore enregistré Yesterday’s Wine ou Pancho & Lefty par exemple. Il eut encore une dizaine de n°1 après ce concert de 1982. Merle laisse la place à ses musiciens pour trois instrumentaux. Il interprète un duo avec Leona Williams, son épouse du moment. Plus curieux, il invite le jeune Vince Gill, vingt-cinq ans, à interpréter une de ses compositions, I’m Almost Ready, enregistrée en 1980 alors qu’il était le chanteur soliste du groupe Pure Prairie League. Vince ne commencera sa carrière solo que deux ans plus tard. Quoi qu’il en soit vingt-quatre titres de country authentique par le Hag, ça ne peut que faire du bien. 

 

Dale WATSON

"Starvation Box" 

Quelques mois après Hank Williams Jr., Dale Watson se met à son tour au blues le temps d’un album. Celui sort presque dans la foulée de son excellent album de reprises paru l’an dernier. Pour être exact il s’agit avant tout d’un album acoustique sur lequel les titres bluesy dominent. Country/blues, folk/blues au rythme à la Muddy Waters, c’est assez varié et coloré d’harmonica. Quelques chansons s’échappent de l’univers du blues comme I Ain’t Been Living Right qui rappelle un peu Gentle On My Mind ou Down Down Down qu’il avait me semble t-il déjà gravé. La country est aussi présente avec Two Peas In A Pod partagé en duo avec Celine Lee. Le douzième et dernier titre est un gospel un tantinet répétitif. Côté vocal pas de surprise, c’est bien du Dale Watson. Mais je préfère ce dernier lorsqu’il fait du honky tonk. 

 

The WEST COAST PINUPS

"Caution: Swinging Doors" 

A-t-on affaire à un groupe de country ou à un groupe de rock and roll? Pas une seule ballade sur un total de treize titres mais une succession de rythmes endiablés. Vous souvenez-vous de cette période où sévissaient ces formations cowpunk des années 70/80? Genre Rank & File ou Lone Justice. The West Coast Pinups n’auraient pas dépareillé. Le vocal est assurée par une chanteuse qui pourrait être la petite fille de Rose Maddox. Elle est entourée de cinq musiciens dont un excellent guitariste. Rockin’country (il y a quand même une pedal steel gui-tare), rockabilly ou rock and roll légèrement déjanté, il n’y a pas de place pour la tendresse chez les pinups de la côte ouest. Assurément ces gens-là ne viennent pas de Nashville. En fait l’album a été enregistré à Austin. Je pense qu’ils créeraient une sacrée ambiance s’ils se produisaient dans un festival français. Une excellente découverte. 

 

Pam JACKSON

"Dream A Little Bigger" 

Pam Jackson est dotée d’une voix agréable, puissante, au service d’une country à la fois contemporaine et conventionnelle. Cette Dublinoise qui n’en est pas à son coup d’essai a réalisé un album bien équilibré entre les ballades et les tempos relevés. Mis à part deux ou trois chansons un peu trop country/pop à mon goût le reste se laisse déguster agréablement. 

 

  Lukas NELSON + PROMISE OF THE REAL

"Sticks And Stones" 

On connait le vieil adage: bon sang ne saurait mentir. Il se vérifie avec Lukas Nelson qui est l’un des fils de Willie. En trio le père et ses deux garçons avaient sorti un album de reprises de classiques country il y a trois ou quatre ans. Lukas n’imite pas son père même si le timbre de voix familier se retrouve et on imagine facilement Willie interpréter lui-même toutes les chansons de son fils, même les rapides Ladder Of Love et Wrong House. Bon, peut-être pas le rock and roll Icarus, bien dansant au demeurant. Cet album sonne plus texan que Nashville malgré un duo avec Lainey Wilson, la chanteuse la plus en vue à l’heure actuelle à Music City. Il faut aussi souligner qu’il est plus country qu’americana et qu’il plaira à un large public.

 

T. Jae CHRISTIAN

"Old Violin" 

Cet album n’est pas nouveau. Il s’agit d’une réédition, l’original remontant à une bonne vingtaine d’années. Cela ne change pas vraiment grand-chose du fait que la country de ce vétéran est des plus classique, autrement dit quelle aurait aussi bien pu être enregistrée il y a trente ou cinquante ans. Si vous aimez les douceurs, c’est-à-dire les ballades à pleurer dans sa bière, et également les voix chaudes et harmonieuses, cet album est pour vous car il y en a onze. T Jae les interprète de sa belle voix de velours située entre Vern Gosdin et Gene Watson. Pour soirées romantiques.